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Actualités of Monday, 28 August 2017

Source: quotidienlemessager.net

Le jour où Mme Marafa s'est agenouillée devant Pierre Semengue

L'ex-secrétaire  d'État, Marafa Hamidou et sa défunte épouse Mme Jeannette Marafa. L'ex-secrétaire d'État, Marafa Hamidou et sa défunte épouse Mme Jeannette Marafa.

L’épouse de l’ancien ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République, Marafa Hamidou Yaya, aujourd’hui condamné à 25 ans de prison, pour « complicité intellectuelle » dans l’affaire d’achat d’un avion présidentiel, est décédée en France le week-end dernier, des suites de maladie.

Une mort bouleversante pour l’ex baron du régime Biya, lorsqu’on sait que depuis toujours, elle s’est tenue droit aux côtés de son époux dans les moments difficiles que ce dernier connaît depuis quelques années du fait des violences d’Etat exercées sur lui par les acteurs du régime dont il a été un fervent serviteur.

La triste nouvelle est tombée vendredi dernier. Madame Jeannette Marafa est décédée à Paris des suites de maladie. L’épouse de l’ancien ministre d’Etat, Marafa Hamidou Yaya, ancien secrétaire général de la présidence de la République puis ancien ministre de l’administration territoriale et de la décentralisation quitte ainsi la scène, de manière quasi inattendue. Certes on la savait malade depuis des mois.

Mais il était difficile pour ses proches notamment de s’attendre à ce qu’elle meure de manière aussi attendue. Surtout que depuis l’arrestation de son époux, elle avait affiché sa détermination à défendre ce dernier condamné à purger une peine de 25 ans. La maladie a eu raison d’elle à Paris en France où elle s’est exilée volontairement pour plaider plus aisément la cause de son mari sur le plan international. Combat gagné partiellement puisqu’il est néanmoins reconnu « prisonnier politique ».

Jeannette Marafa qui disparait ainsi est mère de trois enfants qu’elle a eues avec Marafa Hamidou Yaya. Originaire de Bonassama dans l’arrondissement de Douala IV, elle rencontre celui qui était alors ingénieur de pétrochimie formé en France et aux Etats-Unis à la fin des années 70 ; alors qu’elle-même conduit faisait de bonnes études universitaires en France.

De retour au Cameroun, son mari est haut cadre de la Société nationale des Hydrocarbures lorsque survient les douloureux évènements du 6 avril 1984, avec la tentative de putsch organisé par une factions des gendarmes de l’ex Garde républicaine en majorité constituée des éléments originaires du Grand Nord.

Elle sauve son époux

A la suite de l’échec de ce coup d’Etat, il va s’en suivre une vaste chasse aux sorcières des « nordistes ». Dans l’immense volonté de vengeance qui animait des fidèles et autres opportunistes du président Biya, la plupart des hauts cadres originaires du Grand Nord dont l’actuel ministre de la Communication justement ou injustement dénoncés comme étant les sympathisants du putsch manqué sont arrêtés et sommairement jugés par un tribunal des vainqueurs. Parmi ces hauts cadres, il y a un certain Marafa Hamidou Yaya. Une légende rapportée par certains anciens hauts responsables des services secrets camerounais de l’époque évoque le fait que Marafa Hamidou Yaya a eu la vie sauve grâce à son épouse Jeannette.

En fait dans l’ambiance des tueries collectives des présumés putschistes, il aura fallu un certain général Pierre Semengue aux pieds de qui s’est jetée en larmes Jeannette Marafa. C’est lui qui aurait descendu d’un camion pleins de Nordistes destinées à l’exécution du côté de Mbalmayo. C’est ainsi que Marafa Hamidou Yaya s’en tire un extremis. Marafa sera néanmoins gardé en prison comme bien d’autres personnalités telles que Issa Tchiroma Bakary et autres, le temps de vérifier leur implication réelle ou supposée dans le Putsch.

En tout cas, cette histoire faisant réellement partie du parcours de l’ex ministre d’Etat Marafa, on retiendra déjà la fidélité et l’engagement d’une épouse, Jeannette Marafa. Tout comme dès le 16 avril 2012, lorsque son époux de ministre d’Etat qui venait de quitter le gouvernement quelques mois avant a été arrêté dans le cas de l’affaire de l’avion présidentiel du temps où il était ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République. Il s’agit de la fameuse affaire du BB-Jet dont Le Messager s’était fait l’écho en son temps. Un avion a été commandé pour le président de la République.

L’argent a été remis par l’entremise de la compagnie nationale Camair sous le label duquel l’avion devait être immatriculé, pour contourner les contraintes du Fmi et de la Banque mondiale, deux institutions qui tenaient à l’œil les dépenses du Cameroun. Lorsque Marafa quitte le poste de Sgpr pour le Minatd, alors que l’aéronef est en voie de livraison, son successeur aux fonctions de Sgpr choisi d’annuler la transaction. La société américaine Boeing qui a déjà encaissé l’argent refuse de le rembourser. Conséquence pas d’avion, et pas d’argent donc. Marafa a beau s’expliquer, rien. L’affaire tombe mal pour lui puisqu’il est à tort ou à raison soupçonné de vouloir remplacer l’inamovible Paul Biya dont le régime en 2008 a réussi à imposer la modification de la Constitution pour ôter le verrou de la limitation des mandats présidentiels. Marafa Hamidou Yaya est condamné à 25 ans de prison ferme pour « complicité intellectuelle » de détournement des fonds publics.

Condoléances attendues

Jeannette Marafa, l’épouse éplorée et choquée par cette condamnation, crie au complot et décide d’informer l’opinion nationale et internationale sur les motivations de cette condamnation de son époux. Intervenant sur les ondes de la Radio panafricaine Africa N°1 elle déclare : «Le motif qui a été retenu contre lui, la complicité intellectuelle, n’existe pas en droit pénal camerounais et même français. Cela vient du fait que l’un des accusés était considéré comme un ami de mon mari. Le juge, en rendant sa décision, a d’ailleurs bien spécifié qu’on n’avait rien trouvé prouvant la culpabilité de mon mari.

Cependant, comme il connaissait Monsieur Fotso [l’ancien administrateur directeur général de la Camair condamné dans la même affaire Ndlr] depuis 1993, il a aussi été déclaré coupable » Et de poursuivre : « Mon époux n’a joué aucun rôle déterminant dans l’affaire dite de «l’Albatros», du nom de l’avion de Paul Biya, dont l’achat controversé a conduit nombre de dignitaires camerounais en prison : ce n’est pas lui qui a pris l’initiative de commander cet avion. Ce n’est pas lui qui a pris la décision de débloquer les trente millions de dollars affectés au paiement de cet aéronef et qui auraient été détournés, mais l’ancien ministre camerounais des Finances, Michel Meva’a Meboutou, lequel n’a jamais été inquiété ». C’est donc une épouse véritablement engagée aux côtés de son époux Marafa Hamidou qui s’en va ainsi. Jusqu’au bout, lorsque son mari a eu besoin d’elle, elle était là.

Au final, certaines sources indiquent sur les réseaux sociaux, que madame Marafa pourrait être inhumée selon son vœu en France. En attendant que son époux sorte de prison un jour, et puisse ramener ses restes à Garoua. Une solution qui certainement arrange les faucons du régime qui n’ont pas du tout envie d’un embarras, face à la présence sur le sol camerounais de la dépouille de Jeannette Marafa. Notamment sur la question de savoir s’il faut oui ou non laisser celui qui est considéré par les Etats-Unis comme un prisonnier politique, aller enterrer son épouse.