Actualités of Sunday, 19 October 2025

Source: www.camerounweb.com

Le Cameroun ne sera pas le Sahel : Sam Séverin Ango appelle à la fermeté face aux tensions post-électorales

En pleine période de compilation des résultats de la présidentielle du 12 octobre, Sam Séverin Ango a lancé un avertissement sans détour sur le plateau du « Grand Débat » de CAM 10 Télévision. Face aux tensions qui s'accumulent dans le septentrion, notamment à Garoua où les partisans d'Issa Tchiroma Bakary ont dressé des barricades, l'ancien ministre a exhorté les autorités à faire preuve de « plus de fermeté » auprès des forces de sécurité, qu'il juge « un peu laxistes » depuis quelques temps. Un plaidoyer qui en dit long sur les préoccupations croissantes au sein de l'establishment face au scénario d'une déstabilisation du pays.


La déclaration d'Ango s'inscrit dans un contexte de plus en plus tendu. Alors que le pouvoir hésite entre répression et temporisation, la contestation électorale s'amplifie. Des mouvements de protestation se sont organisés dans plusieurs villes, notamment à Dschang où des manifestants ont incendié le siège du parti au pouvoir. À Mora, dans l'Extrême-Nord, un coordinateur local du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC) a même refusé de signer les procès-verbaux d'Elecam, poussant la police à reculer face au « risque d'explosion populaire ».
Ango craint visiblement un glissement vers le scénario sahélien : instabilité sécuritaire croissante, encerclement des villes, militarisation progressive du territoire. Le Sahel, miné par les insurrections armées et l'effondrement progressif de l'autorité de l'État, reste une référence sinistre aux yeux des décideurs camerounais. L'insistance de l'ancien ministre sur ce point révèle les cauchemars qui hantent Yaoundé.


Cette sortie d'Ango correspond à un durcissement progressif du ton au sein du gouvernement. Paul Atanga Nji, ministre de l'Administration territoriale, avait déjà menacé quelques jours avant le scrutin : « Les portes ne sont pas blindées. L'administration viendra le prendre », parlant d'Issa Tchiroma Bakary. Le 18 octobre, alors que la compilation des résultats se poursuivait, la question sécuritaire dominait le débat dans les couloirs du pouvoir.
Des contingents militaires ont été dépêchés à Garoua depuis Yaoundé, Bafoussam, Ngaoundéré et Maroua. Ferdinand Ngoh Ngoh, secrétaire général de la présidence, s'est rendu dans l'Extrême-Nord pour superviser la situation sécuritaire et calmer les chefs traditionnels. Le gouvernement, divisé entre les partisans de la ligne dure et les modérés craignant une escalade, semble peu à peu pencher vers une approche plus ferme.



Ce qui est intéressant dans le discours d'Ango, c'est son appel à préserver « l'héritage » du Cameroun. Implicitement, il suggère que ce qui se joue actuellement est bien plus qu'une simple élection : c'est la stabilité institutionnelle du pays qui est en jeu. Le Cameroun, dit-il, « a un bel héritage qui mérite d'être préservé » et « survivra à l'élection de 2025 ». Une formulation rassurante en surface, mais qui reconnaît aussi le danger réel.
Cette insistance sur la survie du pays post-élection trahit une certaine nervosité. Si le Cameroun « survit » à 2025, c'est qu'il y a réellement un risque qu'il ne survive pas, ou du moins qu'il en sorte profondément endommagé.

Ango pose en réalité le dilemme fondamental auquel fait face l'exécutif camerounais : comment maintenir l'ordre sans transformer Garoua en place forte militarisée ? Comment écraser la rébellion sans créer les conditions d'une explosion populaire plus large ?