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Actualités of Monday, 1 October 2018

Source: camer.be

Justice: une gardienne de prison fait condamner Laurent Esso

La dame s’insurge contre une décision qui entérine son retard d’avancement sur une durée d’un an La dame s’insurge contre une décision qui entérine son retard d’avancement sur une durée d’un an

L’agent relevant du corps des fonctionnaires de l’Administration pénitentiaire dit avoir fait les frais d’un règlement de comptes du ministre de la Justice à son homologue de l’Administration territoriale, en lui infligeant un retard d’avancement sur la base de faits imaginaires. Le Tribunal administratif est d’accord avec elle et condamne le Garde des Sceaux.

Mme Mengue Ekani Hélène Nathalie, gardienne de prison, était-elle la victime de l’«imbroglio administratif» régnant entre M. Esso Laurent, ministre d’État, ministre de la Justice, Garde des Sceaux et son homologue de l’Administration territoriale au sujet du redéploiement de certains agents de l’État en 2012 ? Elle en était convaincue en saisissant le Tribunal administratif de Yaoundé d’une requête. La dame s’insurge contre une décision qui entérine son retard d’avancement sur une durée d’un an pour «absence irrégulière», une sanction dont elle a écopé parce que le ministère de la Justice (Minjustice) trouvait qu’elle traînait à rejoindre son administration de tutelle après un «détachement» de sept ans au ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (Minatd). L’affaire a fait l’objet de débats le 18 septembre 2018 avec, à la clé, un verdict favorable à l’initiatrice de la procédure.

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Selon les termes de sa requête, la gardienne de prison avait été mise à la disposition du Minat le 13 janvier 2005 avec 12 autres collègues, avec la bénédiction de M. Amadou Ali, ministre de la Justice à cette époque. Sept ans plus tard, précisément le 2 août 2012, ils ont été rappelés et déployés à divers postes de travail au Minjustice. Elle s’est retrouvée affectée à la prison principale d’Akonolinga. Pris de court par la décision de son homologue, le ministre de l’Administration territoriale a adressé au Minjustice un courrier, le 9 août 2012, sollicitant le maintien des agents rappelés. Motif ? Leur départ compromettrait le dispositif de sécurité mis en place autour du lui ???. Cette correspondance signée de René Sadi reste lettre morte. Tout comme celle qu’elle même va initier le 17 août 2012, quelques jours plus tard à l’endroit du ministre de la Justice visant sa mise en disponibilité.

Régisseur surpris

Pour préserver son emploi, explique Mme Mengue Ekani, elle va rejoindre la prison principale d’Akonolinga sans un «ordre de mise en route». Le document finalement signé en sa faveur le 6 septembre 2012 lui octroie un délai de dix jours pour rejoindre le poste d’affectation. Pendant qu’elle vaque à ses occupations, elle sera surprise d’apprendre qu’un procès-verbal de constat d’absence irrégulière a été dressé contre elle. L’acte situe la période de l’absence jugée irrégulière entre le 17 août 2012 et le 1er septembre 2012, soit deux semaines pleines.

Mme Mengue Ekani constate que sa supposée absence au poste est constatée par le Délégué régional de l’Administration pénitentiaire du Centre, à l’insu du régisseur de la prison principale d’Akonolinga, sous la tutelle duquel elle officie régulièrement. Autre curiosité : la gardienne de prison s’émeut de ce que le Minjustice ait signé à son profit un ordre de mise en route daté du 6 septembre 2012, mais constate son absence au poste entre le 17 août 2012 et le 1er septembre 2012, bien avant la date d’émission de l’ordre de mise en route. En dépit de ces contradictions, elle est traduite devant le conseil de discipline. La sanction tombe le 20 février 2015 sous la plume du ministre Esso. Elle écope d’un retard d’avancement sur une durée d’un an. C’est cette décision qu’elle attaque devant le juge administratif.

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Discordances de pages

Devant le tribunal, mardi dernier, Mme Essome Siliki Pauline, représentante du Minjustice, a battu en brèche les dénonciations proférées par la gardienne de prison. Cette magistrate estime que la démarche de la gardienne de prison est irrecevable, voire dépourvue de fondement, au motif qu’il n’existe pas d’identité d’objet entre le recours gracieux préalable de deux pages déposé à la chancellerie en juillet 2015 par la plaignante et le recours contentieux de cinq pages introduit au Tribunal administratif le 14 octobre 2015. Mme Essome Siliki estime en plus que le recours contentieux laisse apparaître dans ces pages supplémentaires, des nouveaux moyens juridiques non évoqués dans le recours gracieux préalable. Plus loin, Mme Essome soutient que l’administration pénitentiaire est placée sous la tutelle du Minjustice depuis décembre 2005 et que les personnels relevant de ce corps de métier continuaient d’être maintenus en «détachement» au Minatd en dépit du changement de tutelle. «Elle a demandé à rester au Minadt, elle y était toujours en service. Elle est complice de son retard d’avancement. Elle a été sanctionnée au terme d’un processus disciplinaire contradictoire. Qu’elle vous prouve qu’il y a eu excès de pouvoir», a déclaré la dame.

À cette audience, le parquet général a décidé de ne pas donner son point de vue sur le litige. Le magistrat intervenant a pris la parole pour indiquer que le ministère public laisse au collège des juges présidé par M. Anaba Mbo Alexandre, le soin de tirer les conséquences de tout ce qui a été soutenu par les acteurs du procès. Au terme des délibérations, le tribunal a sanctionné le Minjustice en prononçant l’annulation de la décision critiquée.