Un soutien stratégique à la contestation. Alain Boris Tientcheu, coordonnateur fondateur du mouvement "Cartes d'électeurs" et de l'association Parole pour Tous, a publié le 22 octobre à Douala une déclaration de soutien implicite à Issa Tchiroma Bakary. Figure de la mobilisation civique ayant joué un rôle crucial dans l'inscription massive des jeunes sur les listes électorales avant le scrutin du 12 octobre, Tientcheu appelle désormais la jeunesse camerounaise à "défendre, avec la dernière énergie, les résultats issus des urnes".

Félicitations à la jeunesse et mise en garde. Dans son communiqué, le coordonnateur du mouvement salue d'abord "la jeunesse qui a activement pris part à l'élection présidentielle du 12 octobre dernier en allant voter pour le changement". Une formulation qui ne laisse guère de doute sur sa position dans la bataille électorale opposant Paul Biya à son challenger de l'opposition.



Tientcheu exhorte ensuite cette jeunesse à défendre les résultats "dans la paix et dans la concorde", tout en lui recommandant de "rester vigilante et méthodique dans l'exercice de leur pouvoir et leurs droits de peuple souverain".
Pression sur le Conseil constitutionnel. Le message le plus direct de la déclaration vise le Conseil constitutionnel, qui doit proclamer les résultats définitifs le 27 octobre. Alain Boris Tientcheu "exige" de l'instance qu'elle proclame "les résultats selon la volonté du peuple exprimée lors du scrutin à l'effet d'éviter toutes déflagrations sociales de nature à briser l'unité nationale". Une formulation qui suggère que les résultats provisoires donnant Paul Biya vainqueur avec 53,66 % ne refléteraient pas la réalité des urnes.
Un appel à la retenue des deux côtés. Le coordonnateur du mouvement tente de maintenir un équilibre délicat dans sa déclaration. D'une part, il recommande à la jeunesse "d'éviter de poser des actes anti-patriotiques et anti-républicains". D'autre part, il appelle "les forces de maintien de l'ordre à respecter la dignité humaine en évitant de poser des actes de tortures et de violences sur les populations". Un double message qui reconnaît implicitement les tensions croissantes sur le terrain.


Un acteur clé de la mobilisation électorale. Le poids de cette déclaration tient au rôle joué par Alain Boris Tientcheu et son mouvement dans la préparation du scrutin. Ses campagnes "d'éducation, de mobilisation et de sensibilisation des jeunes camerounais à s'inscrire massivement sur les listes électorales" ont contribué à l'augmentation significative du nombre d'inscrits pour cette présidentielle 2025. En se positionnant clairement du côté de la contestation, il entraîne avec lui une partie de cette jeunesse qu'il a mobilisée.


Pourquoi c'est important. La déclaration d'Alain Boris Tientcheu, publiée cinq jours avant la proclamation des résultats définitifs, s'inscrit dans une stratégie plus large de pression sur le Conseil constitutionnel. En appelant simultanément au respect de la "volonté du peuple" et à la vigilance de la jeunesse, tout en requérant "des populations le respect des institutions", le coordonnateur du mouvement "Cartes d'électeurs" tente de tracer une voie entre contestation légitime et maintien de l'ordre. Son message, daté du 22 octobre à Douala, intervient au moment où les manifestations se multiplient dans plusieurs villes du pays et où l'accès à internet est fortement perturbé, témoignant d'une crise post-électorale qui s'intensifie.