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Actualités of Friday, 8 December 2023

Source: www.bbc.com

Insécurité dans l’Est de la RDC, l’équation majeure pour les candidats à la présidentielle du 20 décembre

Insécurité dans l’Est de la RDC, l’équation majeure pour les candidats à la présidentielle du 20 déc Insécurité dans l’Est de la RDC, l’équation majeure pour les candidats à la présidentielle du 20 déc

Très riche en ressources naturelles, l’Est de la république démocratique du Congo a basculé dans la violence depuis une trentaine d’années. Malgré toutes les initiatives gouvernementales pour ramener la paix, la situation reste volatile dans plusieurs villages.

Selon l’Organisation Internationales pour les Migrations, OIM, ce sont 6,9 millions de personnes qui ont dû fuir leurs foyers au cours de ces dernières années. Le dernier pointage de cette organisation date du 30 octobre dernier.

De fin octobre au 24 novembre, 4500 nouvelles personnes ont été obligées de se déplacer, affirment le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Refugier, HCR, et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, Unicef.

Les deux organisations ont recensé en plus, plus de 3000 violations des droits humains dont les viols et les exécutions sommaires au cours de la même période.

Des situations qui rendent la vie difficile, pour les populations. Sandra vit dans le territoire de Beni, dans la partie Est de la RDC: « c’est inacceptable de vivre comme ça, on est obligé de supporter».


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Pour sa propre sécurité, la jeune dame doit s’informer régulièrement. «S’il y a une attaque, je cherche à savoir où l’attaque a eu lieu. Si c’est dans ma zone de fréquentation, je reste à la maison », confie-t-elle.

Travaillant depuis une dizaine d’années dans la même region, Pascal subit au quotidien les affres de la guerre qui oppose depuis une trentaine d’années les forces armées de la RDC à des groupes rebelles.

« J’ai vu des proches tués à la machette. Ça cause un profond trouble psychologique » lance-t-il dans un entretien accordé à BBC Afrique. Il a dû scinder sa famille pour la mettre en sécurité.

« C’est difficile pour moi de vivre dans cette situation. En plus, cette guerre a eu un impact économique sur nos vies. Nous vivions activités champêtres. Mais nous ne pouvons plus accéder à nos champs. »

Euduige, elle, a presqu’adopté une vie de nomade. « Notre résidence se trouve à Oïcha. Cependant, nous sommes obligés de nous déplacer chaque fois qu'un village proche est attaqué. Il nous faut immédiatement trouver refuge dans un lieu qui parait plus sécurisé » raconte-t-elle.

Initiatives gouvernementales pour ramener la paix

Depuis le début de la crise, les autorités du pays tentent de prendre des mesures pour l’endiguer.

Pour les initiatives les plus récentes, la plus marquante de ces cinq dernières années a été l’instauration de l’Etat de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri.

Entré en vigueur le 7 mai 2021, par un décret du président Félix Tshisekedi, cette mesure spéciale avait pour but de ramener la paix dans cette partie de la RDC, frontalière avec le Rwanda et l’Ouganda.

Les fonctionnaires civils de la région ont été remplacés par des militaires. Deux ans plus tard, l'insécurité continu à battre son plein dans la zone. Les milices continuent à cibler des civils tout comme des militaires dans des raids qui se soldent souvent par des morts et des déplacements forcés.

Il y a également l'appel à la mobilisation générale dans lequel le gouvernement a demandé à tous les jeunes de faire blocage à ce que les autorités appellent les ennemis qui ont pris les armes contre le pays.

Début novembre 2022, dans une adresse à la nation, le président Tshisekedi a une nouvelle fois chargé le Rwanda de « velléités expansionnistes avec comme intérêt principal l’appropriation de nos minerais », accusations que Kigali a toujours rejetées.

Le dirigeant a ensuite appelé les congolais à « taire nos divergences politiques pour défendre notre mère patrie ».

Un appel à la mobilisation qui a eu le mérite, rapporte notre correspondant à Goma, de réveiller plusieurs « Wazalendo », connus localement pour être des « jeunes patriotes qui sont prêts à se battre aux côtés de l’armée. »

Des membres de la coalition politique au pouvoir ont présenté ces civils armés comme des réservistes sans donner plus de détails sur la nature ni les termes de référence de leurs opérations.

Les autorités ont aussi mis sur pied une mesure d’initiation au patriotisme au niveau des universités ainsi que la formation des jeunes étudiants. Formation qui est en cours et dont l'objectif est de constituer une réserve de l’armée congolaise.


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On peut également citer le Programme désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRC-S), qui vise à désarmer les membres de groupes rebelles exerçant dans la zone et les réinsérer dans la vie civile, à travers des activités génératrices de revenus.

Des activités de réinsertion sont financés par plusieurs organisations internationales.

Pour ce qui est de Beni et ses environs, on note le lancement de l’opération conjointe entre l’armée congolaise et l’armée ougandaise dénommée « opération Shujaa » contre les éléments ADF.

Le groupe Forces démocratiques alliées, ADF, est une rébellion d’origine Ougandaise basée dans la région de Beni depuis les années 90. Il a prêté allégeance aux djihadistes de l’Etat Islamique et attaque régulièrement des civils avec des armes à feu et des armes blanches.

Les opérations conjointes entre l’armée ougandaise et les troupes congolaises ont réussi à les repousser loin des grandes agglomérations. Bien que cette coalition a pu réduire sensiblement leur capacité de nuisance, les rebelles ADF n’ont pas arrêté leurs attaques régulières sur des civils.

Sur le plan diplomatique, il y a eu les mécanismes de Luanda et de Nairobi, censés répondre aux problèmes de conflits armés. Sur le même chapitre, il y a eu deux dialogues de Nairobi qui ont réuni les autorités et plusieurs groupes armés locaux. Sur demande du gouvernement congolais, les rebelles du M23 n'ont pas été invités à ces assises.

Et c'est de ces initiatives diplomatiques qu'est né le déploiement de la force régionale de la communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Est, dans la province du Nord-Kivu. Malheureusement, celle-ci a entamé son retrait le 3 décembre 2023.

Déployée pour un mandat d’un an en décembre 2022, son mandat expire le 8 décembre. Les dirigeants Est-africains réunis le 24 novembre en Tanzanie avaient annoncé qu’ils ne renouvelleraient pas le mandat de cette force. Le gouvernement congolais l'a ouvertement critiqué ces derniers temps, lui reprochant de ne pas s'engager dans des combats aux côtés des forces armées de la RDC, FARDC.

Dans la foulée de ces retraits, les rebelles du M23 ont annoncé qu'ils allaient réoccuper les zones laissées libres par les troupes de l’EAC.

Le conflit persiste

Le constat qui met tout le monde d'accord, c'est que la guerre persiste. On parle aujourd’hui de 6,9 millions de déplacés internes dont la grande partie se trouve dans les provinces sous État de siège.

Au cas où le M23 mettrait en pratique ses intentions de reprendre les territoires laissés par les bases des différentes forces est africaines, on imagine une nouvelle escalade de violences dans cette partie de la RDC qui avait déjà manqué les élections de 2018, pour raisons sanitaires avec la présence de la fièvre hémorragique Ebola, et sécuritaires du fait de l’action de groupes armés rebelles.

Les M23 défait en 2013 a refait surface depuis 2021, même si les observateurs pense que est que l'État de siège instauré a eu pour effet de diminuer l’affairisme de certains officiers de l’armée congolaise.

La mobilisation générale a permis au gouvernement congolais de recruter dix mille jeunes qui ont été formés et déployés dans la province du Nord-Kivu.

Pour le dialogue de Nairobi avec les groupes armés, les discussions ont abouti au désarmement de certains miliciens. Pour l’heure, il est difficile de faire une évaluation chiffrée des opérations.

Les raisons de l’échec des initiatives

Dans l’Est de la RDC, les organisations de la société civile manifestent régulièrement pour demander la sécurisation complète de la région.

Pour Ricardo Rupandé, président de la coordination des organisations de la société civile dans le secteur de Rwenzori, les raisons des difficultés à pacifier les localités touchées ne sont pas cachées.

« Il y a une faible formation des militaires congolais et une mauvaise gestion de la guerre » explique-t-il avant d'ajouter qu'il y a « très peu de collaboration entre l'armée et la population locale. »


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C’est ce qui explique, selon cet acteur de la société civile, « l’accentuation de la création des groupes armés dans la zone. Plusieurs jeunes se sont sentis abandonnés presque par leur armée. Ils se sont dit: qu'est-ce que nous pouvons faire pour nous protéger contre la menace ADF? Parce que c'était une menace sérieuse» pense-t-il.

« La paix ne reviendra pas avant les élections »

C’est l’avis de Onesphore Sematumba, analyste pour la région des Grands Lacs chez International Crisis Group. Pour lui, les autorités confondent de méthodes dans la résolution de « ces crises anciennes qui reviennent de façon cyclique. »

M. Sematumba passe au crible l'approche militariste du gouvernement congolais. « Comme c'est une insurrection armée, on a tendance à répondre massivement par les armes » fait-il remarquer. Or, poursuit l’expert, « Félix Tshisekedi lui-même s'est rendu compte rapidement que l'armée ne pouvait pas y faire face. Il a tenté en régionalisant l'aspect militaire. Il a fait appel aux forces de l'EAC. Mais de plus en plus, la force régionale s'est muée en force d'interpositions en mettant en place des sortes de zones tampon dont personne ne voulait. »

L’expert pense aussi que la période électorale en cours retarde la résolution de la crise.

« Nous sommes en période électorale et le président Tshisekedi est candidat à sa propre succession. Il sait que l'opinion congolaise est farouchement opposée à tout infléchissement de la position vis à vis du M23 et du Rwanda qui est accusé, malgré les désapprobations véhémentes de Kigali, d'être derrière la rébellion ».

Cette escalade de violence verbale radicalise les positions, et complique toute action de médiation.

«Du côté du M23, on réagit du tic au tac en disant que si c’est la guerre qu’il veut, on va la lui donner. Côté Rwandais on dit: s’ils nous attaquent, nous sommes prêts pour la riposte ».

Mais Onesphore Sematumba conseille tout de même d’être optimiste. « Peut-être que quand la pression électorale aura baissé et que le président qui sera élu, que ce soit Tshisekedi ou que ce soit un autre, aura moins de pression de son opinion et pourra peut-être infléchir ce discours. »


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