Actualités of Monday, 1 December 2025

Source: L’Indépendant n°985

Indécence : le directeur de l'Esstic dévoile des secrets

Choses anormales Choses anormales

Dans son célèbre essai « Les intellectuels faussaires », Pascal Boniface explore les liens de connivence d’une certaine intelligentsia avec l’ordre établi. Journalistes en vue, universitaires cathodiques, ils noyautent la vérité, manipulent l’opinion publique, et excellent dans ce que Julien Benda nomme « l’engagement séculier » dans La trahison des clercs.

La récente sortie du directeur de l’Esstic, ancien rédacteur en chef du poste national et ancien directeur délégué du centre de formation de la CRTV, n’en finit pas de faire des vagues. En tançant vertement le mémoire de fin de stage professionnel d’un élève qui a passé 14 ans pour soutenir un torchon d’à peine 20 pages, il met en exergue les allées et les couloirs nauséeux de nos grandes écoles.

Des circuits d’entrée à la formation au rabais, des rebus de la société pour être nés de l’autre côté de brouillard, prennent des positions élitaires au détriment de brillants sujets laissés sur le bas-côté de la route. L’élite n’est plus la consécration du mérite républicain. Celui qui en d’autres temps soutenait un mémoire sur « les silences présidentiels », n’ignore rien de cette société de la connivence et de la complaisance.

Dans les domaines du journalisme, la médecine, l’aéronautique, l’enseignement, les tricheurs sont rapidement rattrapés par l’impitoyable sanction publique. L’Enam vient de confirmer sa tradition désormais établie d’école réservée à ceux qui peuvent se prévaloir du piston, du chèque ou de la cooptation. On est au-delà de la simple reproduction sociale au sens du sociologue français, Pierre Bourdieu.

Son collègue Bruno Latour, parlerait du citoyen condamné à devenir un « acteur-réseau » au risque de sombrer dans « le désalignement ». En dehors de la visibilité offerte par les nouveaux médias qui font et défont les destins, il y a tous ces réseaux du fric et du toc, de la porno-politique, du mystico-religieux, et de ces fils à papa parfois condamnés par leur patronyme et parmi lesquels ils restent néanmoins de brillants sujets.

Lorsque l’argument tribal s’en mêle, le mérite va à vau l’eau. Dans son sens achevé de la manipulation au regard de l’explosion de ces scandales en série lors des concours d’entrée dans les grandes écoles, le ministre de l’Enseignement supérieur soutenait que « l’intelligence n’est pas l’apanage d’une région ».

On lui retorquerait que le génie n’est ni contagieux, ni héréditaire. Et pour reprendre Pierre Bourdieu, « le capital culturel est acquis ». Il n’est pas cessible hélas.