Actualités of Tuesday, 7 October 2025

Source: www.camerounweb.com

HUMILIATION - Quand les écoliers crient "Tchiroma" au lieu de "Biya" : l'humiliation du pouvoir (vidéo)

Image illustrative Image illustrative

EXCLUSIF - Alors que Paul Biya effectue son unique meeting de campagne, des élèves réquisitionnés pour l'accueillir ont été filmés scandant le nom de son principal adversaire. Un camouflet symbolique à cinq jours du scrutin.
Par la rédaction



L'image est gênante pour le pouvoir. Quelques heures avant l'arrivée de Paul Biya à Maroua ce mardi 7 octobre, des groupes d'élèves réquisitionnés pour composer le décorum de l'accueil présidentiel ont été filmés en train de chanter... le nom d'Issa Tchiroma Bakary, principal opposant au chef de l'État dans la région de l'Extrême-Nord. Lebledparle.com révèle cette scène capturée dans les rues de la capitale régionale, qui illustre un malaise profond dans ce qui était censé être une démonstration de force du pouvoir.


La préparation du meeting présidentiel a nécessité la mobilisation massive des établissements scolaires de Maroua. Comme à l'accoutumée lors des visites présidentielles, les écoles ont été réquisitionnées, les élèves enrôlés pour former des haies d'honneur et créer l'atmosphère festive attendue par le protocole.


Mais cette fois, le scénario n'a pas fonctionné comme prévu. Lebledparle.com rapporte que "des groupes d'élèves, pourtant censés faire partie du décorum, ont été aperçus, quelques heures avant l'arrivée présidentielle, chantant à l'unisson le nom d'Issa Tchiroma Bakary".

Une scène qui en dit long sur l'état d'esprit de la jeunesse de Maroua, même parmi ceux qui sont censés applaudir mécaniquement le pouvoir en place.

L'humiliation est double pour le camp Biya. D'abord, elle révèle l'échec du formatage habituel des jeunes lors des cérémonies officielles. Ces élèves, qui auraient dû scanner religieusement "Paul Biya !", ont préféré exprimer leur préférence pour son adversaire direct dans la région.

Ensuite, elle intervient au pire moment : juste avant l'unique meeting de campagne du président sortant, dans une région qu'il doit absolument reconquérir après la défection de plusieurs de ses anciens alliés du Nord.
Selon Lebledparle.com, "cette scène pourrait illustrer la diversité des voix et la vitalité démocratique dans cette partie du pays". Une formulation diplomatique pour décrire ce qui s'apparente à une rébellion symbolique au cœur même du dispositif d'accueil présidentiel.

Le média en ligne utilise un proverbe africain éloquent : "Même si 'le chef s'en va, les bruits restent', le spectacle de l'unité autour du pouvoir est mis à mal par ces élans spontanés en faveur de l'opposition."

Cette référence au proverbe souligne que, malgré les apparences que le pouvoir tentera de maintenir durant le meeting officiel, la réalité des sentiments de la population a filtré avant même l'arrivée du président. Les "bruits" – c'est-à-dire les véritables opinions – ont précédé le discours officiel.

Pour comprendre l'ampleur de cette humiliation, il faut rappeler qui est Issa Tchiroma Bakary. Ancien ministre de la Communication, fidèle serviteur du régime pendant des décennies, originaire de l'Extrême-Nord, il incarne la rupture la plus douloureuse pour Paul Biya dans cette région.

Son passage dans le camp de l'opposition a créé une brèche dans le dispositif électoral du RDPC au Nord. Que des jeunes de Maroua scandent son nom plutôt que celui du président en exercice témoigne de l'impact de cette défection et du crédit dont jouit l'ancien ministre dans sa région d'origine.
Tchiroma Bakary a d'ailleurs multiplié les promesses envers les populations du Nord, allant jusqu'à conclure des accords avec certains groupes pour maximiser sa mobilisation électorale.

Lebledparle.com souligne que "l'ambiance de cette visite, préparée dans la précipitation et sous haute sécurité, est déjà teintée de contradictions". Cette précipitation pourrait expliquer les ratés dans l'encadrement des élèves mobilisés.

Habituellement, lors des visites présidentielles, les services de sécurité et le protocole veillent à ce que chaque détail soit contrôlé, chaque slogan vérifié, chaque groupe encadré. Cette fois, la contrainte temporelle – Paul Biya n'ayant décidé de venir sur le terrain qu'in extremis – a laissé des failles dans le dispositif.

Le contraste est saisissant entre "l'enthousiasme forcé des autorités" et les chants spontanés des jeunes en faveur de Tchiroma Bakary. Lebledparle.com décrit un "accueil chaleureux et hautement symbolique" réservé au couple présidentiel par les autorités, mais cette chaleur institutionnelle semble ne pas avoir déteint sur la population, même la plus jeune.

Les autorités locales, nommées par le pouvoir central, n'ont d'autre choix que de manifester leur loyauté. Mais les élèves, eux, ont exprimé une préférence qui échappe au contrôle du protocole officiel.

"La question n'est plus de savoir si le président tiendra son discours, mais si ce dernier réussira à couvrir le murmure grandissant des populations en faveur du changement", analyse Lebledparle.com. Ce "murmure" capté à travers les chants des écoliers pourrait bien se transformer en bulletin de vote le 12 octobre.
Le média ajoute que "ce murmure, à cinq jours du scrutin, pourrait se transformer en un vote décisif". Dans une élection où chaque voix compte, où l'Extrême-Nord représente un réservoir électoral crucial, ces scènes d'écoliers scandant le nom de l'opposant prennent une dimension prophétique.

Pour Paul Biya, cette visite à Maroua devient un test de résilience. Peut-il encore mobiliser dans une région où ses anciens lieutenants l'ont abandonné ? Peut-il encore susciter l'adhésion spontanée, ou doit-il se contenter de l'obéissance administrative ?

L'incident des écoliers révèle une fissure dans le monolithe du pouvoir. Même les jeunes, traditionnellement les plus facilement mobilisables lors des cérémonies officielles, manifestent leur préférence pour l'opposition. Un signal inquiétant pour le camp présidentiel.

Ces vidéos d'élèves chantant "Tchiroma" au lieu de "Biya" sont exactement le genre d'images que le pouvoir redoute. Elles circulent déjà sur les réseaux sociaux, alimentant les commentaires et les analyses. Elles donnent du grain à moudre à l'opposition et sèment le doute sur la capacité du président sortant à reconquérir ses anciens bastions.