Actualités of Friday, 26 December 2025

Source: www.camerounweb.com

Guerre de clan à Etoudi: René Emmanuel Sadi, l'homme qui aurait pu succéder à Paul Biya

Dans une enquête exclusive, Jeune Afrique lève le voile sur une légende persistante au Cameroun : une réunion secrète entre Ahmadou Ahidjo, Paul Biya et René Emmanuel Sadi où la succession présidentielle aurait été évoquée. Portrait d'un dauphin déchu.

Il existe au Cameroun une légende tenace concernant René Emmanuel Sadi. Une histoire qui circule dans les couloirs du pouvoir depuis des décennies et que Jeune Afrique révèle dans son édition du 26 décembre : celle d'un huis clos réunissant Ahmadou Ahidjo, Paul Biya et lui-même, au cours duquel l'idée d'une succession en sa faveur aurait été évoquée.


Jeune Afrique rapporte que René Emmanuel Sadi, "prudent, ne s'en est jamais ouvert" publiquement. Pourtant, cette légende continue de coller à la peau du ministre de la Communication, alimentant les spéculations sur ce qui aurait pu être : un Cameroun dirigé par Sadi plutôt que maintenu sous la présidence de Paul Biya pendant plus de quatre décennies.

Cette rumeur persistante explique en partie pourquoi, selon les sources de Jeune Afrique, nombreux sont les Camerounais à avoir "questionné l'ambition" de Sadi de parvenir un jour à la tête du pays. Un destin présidentiel qui semblait tracé, mais qui s'est progressivement évanoui.


Pour comprendre cette trajectoire, Jeune Afrique retrace le parcours impressionnant de cet ancien diplômé de l'Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC). Débutant sa carrière au ministère des Relations extérieures, puis à l'ambassade du Cameroun au Caire, Sadi rejoint la présidence en 1979 comme chargé de mission.

Selon les informations recueillies par Jeune Afrique, il devient ensuite directeur de l'école des cadres, directeur de cabinet du président de l'Union nationale camerounaise (UNC), avant de gravir tous les échelons : directeur adjoint du cabinet civil en 1985, conseiller diplomatique, secrétaire général adjoint de la présidence en 2004, secrétaire général du comité central du RDPC en 2007, puis ministre de l'Administration territoriale.

Le tournant se produit en 2018. Jeune Afrique révèle que sa nomination comme ministre de la Communication a été "largement perçue comme marginale" et constitue "moins un remaniement qu'une mise à l'écart".
Une source proche de la présidence confie au magazine : "Le poste qu'on lui a attribué à la Communication, c'était avant tout pour l'humilier", alors même qu'on le présentait comme dauphin du chef de l'État.

Pour Jeune Afrique, cette affectation marque le début de la marginalisation systématique d'un homme qui incarnait la vieille garde du régime.
"S'il était possible de démissionner, il l'aurait fait"

Les révélations de Jeune Afrique sur l'état d'esprit actuel de René Emmanuel Sadi sont édifiantes. Une source proche de la présidence déclare au magazine : "S'il était possible de démissionner, il l'aurait fait depuis longtemps".
Cette confidence exceptionnelle illustre le malaise profond d'un homme qui se retrouve piégé dans un système qu'il a contribué à bâtir pendant plus de quarante ans, mais dont il ne contrôle plus les rouages.

Jeune Afrique cite également une autre source qui brosse le portrait d'un homme intègre : "Sadi n'est pas dans des questions d'argent et il n'est pas dans le petit carnet de certains, c'est un peu le monsieur propre du gouvernement".
La guerre des clans s'intensifie

Le magazine panafricain analyse comment René Emmanuel Sadi, comme Laurent Esso (ministre de la Justice qui compte parmi ses grands soutiens), appartient à "cette génération d'anciens compagnons du chef de l'État" progressivement écartés par un nouveau cercle de pouvoir.

Selon Jeune Afrique, "le retrait progressif de Paul Biya de la vie publique et la montée en puissance des cercles liés à Ferdinand Ngoh Ngoh" ont placé Sadi "en position de chef de file d'une frange historique de barons du RDPC qui n'acceptent de rendre des comptes qu'au président".

Le magazine révèle que malgré "le séisme de la présidentielle du 12 octobre dernier", ces barons historiques "continuent pour le moment de servir, avalant la couleuvre de leur marginalisation". Mais Jeune Afrique constate que "la guerre des clans ne s'en poursuit pas moins".

L'histoire de René Emmanuel Sadi, telle que racontée par Jeune Afrique, est celle d'une succession confisquée, d'une ambition peut-être trahie, et surtout d'un homme qui refuse de disparaître en silence. Ses récentes sorties médiatiques et ses confrontations avec le nouveau cercle du pouvoir montrent qu'il entend bien rappeler son existence et sa légitimité historique.
Reste à savoir combien de temps encore ce baron révolté pourra tenir face à un système qui semble avoir décidé de tourner la page de sa génération. Une chose est certaine, selon Jeune Afrique : René Emmanuel Sadi ne partira pas sans livrer bataille pour l'héritage politique auquel il estime avoir droit.