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Actualités of Friday, 15 December 2023

Source: www.bbc.com

Félix Tshisékédi défend son bilan et promet

Félix Antoine Tshisékédi et sa femme Félix Antoine Tshisékédi et sa femme

Parmi les 22 candidats qui tentent de convaincre les électeurs en République Démocratique du Congo (RDC) figure Félix Antoine Tshisékédi, président de la République, candidat à sa propre succession. Il sollicite la voix des 40 millions de Congolais qui sont appelés aux urnes le 20 décembre prochain, après cinq ans à la tête du pays. Le bilan de ses actions, selon les analystes, est un peu mitigé.

Sur le terrain actuellement en RDC, les candidats en lice pour l’élection présidentielle et leurs équipes de campagne sont en opération de charme. La plupart des Province du pays sont investis, les uns pour défendre le bilan de 5 ans d’exercice du pouvoir, les autres avec des promesses, le tout dans le but d’appâter les électeurs.

Elu pour la première fois en décembre 2018, Félix Tshisékédi a, au cours de la campagne électorale à l’époque, égrené une litanie de promesses qui ont peut-être séduit son électorat. Notamment la lutte contre l’insécurité surtout dans la partie Est du pays, la réduction du taux de chômage, la lutte contre la corruption, etc.

Félix Tshisékédi a un bilan à défendre, lui qui est cette semaine en Province en pleine campagne. Et ce bilan est un atout, selon Professeur Daniel Mukoko Samba, Directeur politique de l’équipe de campagne du président-candidat. « Il a l’autorité de la chose tentée », dit-il concernant son candidat, surtout lorsqu’on lui pose la question sur les réalisations de son candidat.

Le président sortant de la RDC n’est pas complexé par son bilan à ce qu’il paraît. Le directeur politique de sa campagne reconnaît qu’il peut y avoir des insuffisances, mais a fait noter qu’il a réalisé son bilan dans un « contexte international extrêmement difficile », notamment la pandémie de Covid-19, la guerre russo-ukrainienne, la crise économique mondiale, et les conflits à l’Est du pays, une situation qui dure depuis plus de trois décennies.

Un bilan qui mérité une seconde chance, selon Prof. Mukoko

Il faut le dire, lors de son élection en 2018, Félix Tshisékédi avait créé de l’espoir auprès des Congolais, étant donné que c’était la première alternance politique pacifique. Et selon ses proches, les uns et les autres doivent garder cet espoir parce qu’il a entamé un programme qui a déjà donné des fruits et qui a besoin d’être poursuivi. « Les acquis obtenus ont besoin d’être consolidés », selon Mukoko Samba.

Pour lui, il y a une « force de la volonté » chez le président sortant. Cela s’est traduit, selon lui, par la décision de M. Tshisékédi dès le début de son mandat de mettre en œuvre l’enseignement obligatoire pour l’école primaire, une disposition constitutionnelle qui existait depuis 2006.

C’est 13 ans après l’entrée en vigueur de cette disposition constitutionnelle qu’un président de la République décide de la mettre en œuvre. Un défi que s’était lancé Félix Tshisékédi. « On avait pas encore réussi à mettre en œuvre cette politique. Elle est coûteuse. Tout le monde disait à l’époque qu’on y arrivera pas, on n’a pas d’argent pour le faire », se rappelle le directeur politique de l’équipe de campagne du président sortant.Mais la décision du candidat Tshisékédi était « irréversible ». « C’était au gouvernement et à toutes les institutions politiques de s’ajuster pour que ce qui est dit dans la constitution se fasse », ajoute-t-il.

Cette politique a été effective, selon M. Mukoko, puisque les 7 millions d’enfants environs que compte la RDC ont pu rejoindre les salles de classes. « Si vous parcourez l’ensemble du territoire et visitez les classes de recrutement à l’école primaire, ce que vous allez remarquer, c’est qu’elles sont bondées d’enfants », souligne-t-il en reconnaissant toutefois que la mesure a mis en évidence un certain nombre de problèmes.

L’insuffisance de classes et d’enseignants était le problème principal, ce qui fait dire aux adversaires politiques du président qu’il n’avait pas mesuré les contours d’une telle décision avant de la prendre.

Une lutte efficace contre l’insécurité qui doit se poursuivre

Selon l’Organisation mondiale de l’immigration (OMI), 6,9 millions de personnes se sont déplacées en interne en RDC. C’est le record dans l’Est du pays sous Félix Tshisékédi. Cela doit être perçu comme un échec dans le bilan de son premier mandat.

Mais pour la direction de campagne de Tshisékédi, cette situation n’est pas nouvelle. Elle est récurrente. « Ce n’est pas par le fait du gouvernement congolais. Ces gens quittent leur village parce qu’ils sont victime des actions des groupes armés étrangers qui sont sur le territoire congolais », justifie Prof. Mukoko Samba.

Félix Tshisékédi tient pourtant à sa promesse de résoudre ces crises dans l’Est du pays. Il a même par la suite décrété un état de siège très critiqué à l’époque. Il est vrai qu’il y avait eu une accalmie dans certaines zones à un moment donné, mais les combats ont vite repris.

Ce qui s’est passé entre 2019 où Tshisékédi entrait en fonction et aujourd’hui, poursuit M. Mukoko, c’est essentiellement dans la Province de l’Ituri où il y a des affrontements instrumentalisés entre communautés et aussi de le Nord et le Sud Kivu.

« Ce que Tshisékédi tente de faire dès le début, c’est de régler le problème qui est dû à l’interférence des Etats voisins sur notre frontière orientale. Et il veut le faire par la diplomatie, par l’intensification de la coopération économique pour bâtir des intérêts économiques mutuels afin de mettre un terme à l’exploitation illégale des ressources naturelles de la République Démocratique du Congo », explique-t-il.

C’est en ce sens qu’il évoque la main tendue de Félix Tshisékédi aux autres nations des Grands Lacs, selon le Pacte de stabilité et le développement de la région des Grands Lacs.

Sur le plan interne, il a promis lancer des opérations militaires, demandé aux groupes armés de déposer les armes. Il leur a surtout demandé de rejoindre le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion.

« Qu’est-ce qu’un président entrant qui veut se concentrer sur le développement de son pays ne ferait pas autrement que ça ? », demande le directeur de campagne qui avoue tout de même que ce plan n’a pas marché. Et d’ajouter : « Il l’assume. C’est la raison pour laquelle il adopte aujourd’hui un ton ferme, qu’il n’est pas question de laisser un pays étranger venir régulièrement nous perturber ».

Des accusations après la main tendue

N’ayant pas réussi à convaincre ceux que le peuple congolais estiment être ses agresseurs et sont à l’origine de l’instabilité d’une partie du pays, Félix Tshisékédi pointe aujourd’hui du doigt les voisins. Une situation que d’aucuns ne trouvent pas très rassurante dans le bilan à l’actif du président sortant.

Ce n’est pas seulement Tshisékédi qui accuse ses voisins de l’instabilité de son pays, selon Mukoko Samba qui donne l’exemple de la France qui a demandé cette semaine au Rwanda de retirer ses troupes en RDC. Il reconnaît que ce n’est pas un gain pour le bilan du président-candidat, mais estime qu’ils sont dans la droite ligne de ce qu’il prône. « Il faut que ces pays aillent jusqu’au bout de leur logique. Si vous dénoncez, sanctionnez ! Il faut qu’ils prennent des mesures », appelle-t-il.

Pourquoi accorder un second mandat à Tshisékédi ?

« Consolider les acquis », c’est le slogan de campagne du candidat Félix Tshisékédi. Pour lui, il y a des chantiers entamés au cours du premier mandat, qui doivent être poursuivis et terminés, surtout sur le plan de développement local et de la sécurité.

Le fait que le président descende dans les Provinces comme Goma, Béni ou Botenbo pour aller battre campagne est déjà un succès, selon le directeur de campagne.

« Il y est allé et il a été bien accueilli. Parce que ce peuple de Béni, de Goma a reconnu en lui ce caractère de résistant. Quelles que soient les difficultés, les tentatives de déstabilisation, ce pays restera uni dans ses frontières du 30 juin 1960 », affirme Daniel Mukoko Samba.

La capitale de la RDC n’a pu contrôler la totalité du territoire, surtout entre 1998 et 2003. Mais ces cinq dernières années, selon lui, les examens scolaires ont pu se dérouler sur l’ensemble du territoire avec Félix Tshisékédi.

Pour ce qui concerne l’occupation de certains territoires par les rebelles de M23, il indique que ce n’est pas la première fois sous Tshisékédi que cela se passe. Il estime que c’est arrivé sous Joseph Kabila également.

« Il ne reste plus grand-chose sur notre parcours pour vaincre définitivement notre adversaire », a déclaré le candidat Félix Tshisékédi à Goma où il était en campagne il y a quelques jours. Une promesse qui fait partie de la « force de volonté » du président, selon son directeur de campagne.

Aussi, avait-il parlé de la restructuration d’une armée forte, en appelant les jeunes à se faire recruter. Pour Mukoko Samba pour qui l’armée est en pleine réorganisation, c’est par millier que les jeunes avaient répondu à cet appel de Tshisékédi. « Sous Tshisékédi, on a eu pour la première fois une loi de programmation militaire qui prévoit des crédits budgétaires conséquents pour la restructuration, la réorganisation et le rééquipement de l’armée », rappelle-t-il.

Mais en même temps que cette réorganisation se faisait, poursuit-il, les rebelles du M23 avec tout l’appui de l’armée rwandaise viennent perturber ce processus. En même temps que l’armée se bat, Tshisékédi a écouté ses pairs et autres organisations de la sous-région, parce qu’il « a fait preuve d’un leader qui veut la paix ».

Malgré cette assurance affichée par rapport à l’armée congolaise, le pouvoir de Tshiskédi a quand même demandé l’intervention d’une force de la SADEC, alors que le pays avait expérimenté l’appui d’une force qu’il a estimé n’était pas à la hauteur.

Pour M. Mukoko, le président Félix Tshisékdi ne veut que la paix. Il a montré qu’il est prêt à aller sur toutes les avenues possibles pour atteindre cet objectif. « L’objectif ultime, ce n’est pas de faire la guerre. C’est de faire la paix, la paix dans la région des Grands Lacs. Nous avons bien d’autres choses à faire que de dépenser nos énergies et nos ressources à nous battre », dit-il.

Pour lui, la RDC va « user de tous les moyens pour obtenir cette paix », quitte à demander l’intervention d’une force régionale pour l’avoir.

Sur les attentes des Congolais

Aujourd’hui en RDC, la population attend beaucoup de Félix Tshisékédi qui leur demande un second mandat. Et selon son directeur de campagne, il a un programme qui répond aux préoccupations des uns et des autres.

Le président-candidat a pris des engagements vis-à-vis du peuple pour améliorer son quotidien, surtout au niveau de l’emploi des jeunes. Il attache donc l’importance à chacun de ses engagements, selon son entourage. L’économie de la RDC est parmi celle dont la croissance est en progression, à en croire M. Mukoko. Mais elle ne crée pas d’emploi. Conscient de la situation, Tshisékédi a pris sur lui de créer des millions d’emploi de manière volontariste.

Il s’agit, comme l’explique le directeur de campagne, d’aider les multiples entrepreneurs éparpillés dans la ville de Kinshasa à avoir accès aux crédits, rentabiliser leurs petites entreprises pour les rendre plus compétitives et, par ricochet, créer plus d’emplois. « Il est proposé un programme qui consiste à formaliser ces activités informelles avec bien sûr le secteur privé », souligne-t-il.

Il est prévu que l’Etat cède des terres au secteur privé qui va construire des espaces de sorte que des gens puissent travailler de manière mutuelle. Une promesse bien belle que ceux qui accusent le régime de Tshisékédi de clientélisme, de népotisme, de tribalisme trouvent utopique.

Le Directeur politique de l’équipe de campagne du président sortant balaie du revers de main ces accusations en affirmant qu’à plusieurs reprises, Félix Tshisékédi a reçu les jeunes dans le cadre de son programme sur le chantier de l’entrepreneuriat des jeunes sous son premier mandat. Un projet d’appui aux petites et moyennes entreprises a même été mis sur pied selon lui, financé par le gouvernement et la BAD à hauteur de 100 millions de dollars.

« C’est un processus transparent avec un appel à des projets des jeunes. Evidemment il y avait des critères. Il fallait que ce soient des projets portés par de jeunes mais qui n’avaient pas des moyens », indique-t-il en informant que 403 projets avaient été retenus, créant 4.000 emplois en tout entre 2021 et 2023. « Et c’est 10 emplois par petites et moyennes entreprises créées par des jeunes congolais », insiste Mukoko Samba.

Dans la poursuite de son programme de développement local des 145 territoires, il est question de rouvrir ces 52.000 km de route, de faire des forages d’eau pour apporter l’eau potable en milieu rural, de continuer à construire des écoles et des centres de santé, de financer l’agriculture pour créer des chaînes de valeur agricole.

Des chantiers qui appellent le peuple congolais à renouveler sa confiance au président Félix Tshisékédi, selon Prof. Daniel Mukoko Samba.

Méfiance des acteurs politiques envers le président sortant ?

Le directeur de campagne n’en voit pas. Et il rappelle la main tendue de Félix Tshisékédi en fin 2020 où il a lancé un appel à l’union des forces politiques pour sauver la nation. Il a tiré vers lui un grand nombre de leaders politiques qui sont repartis ensuite. « Ils sont libres », dit-il.

Et c’est la preuve de la démocratie, selon lui. Aujourd’hui, les candidats circulent librement à travers le territoire lors de ces campagnes. Pour lui, le « chaos électoral » que prédisent certains candidats n’aura pas lieu.

« Beaucoup avaient prédit qu’il n’y aura pas d’élection, beaucoup avaient prédit que ce processus était vicié dès le départ. Mais est-ce qu’ils ne se sont pas inscrits dans ce processus ? Il n’y a qu’un seul processus électoral en cours. Il n’y en a pas deux. Ils sont tous à bord. Nous sommes tous dans le même bateau », déclare-t-il.

Il précise que les élections auront lieu et un vainqueur sera connu. Tout le monde bat campagne pour qu’on vote pour lui le 20 décembre prochain, conclut-il.