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Actualités of Tuesday, 30 November 2021

Source: Kalara

Epervier: un témoin accable les anciens maire et sous-préfet de Lobo au TCS

François Bindzi Ebodé était le maire de la Commune de Lobo à l’époque des faits François Bindzi Ebodé était le maire de la Commune de Lobo à l’époque des faits

Les deux premiers témoins du parquet décrient devant le Tribunal criminel spécial, les supposées irrégularités commises par la commission de constat et d’évaluation des victimes des travaux de construction de l’autoroute Yaoundé-Douala dans l’arrondissement de Lobo, département de la Lékié, dans la région du Centre.

Le 16 novembre 2021, M. Engama et M. Marcel Noah Ekassi ont ouvert le bal des auditions des témoins du parquet dans l’affaire opposant l’État du Cameroun à certains membres de la sous-commission de constat et d’évaluation des dégâts causés aux propriétaires des parcelles de terres et d’investissements par le chantier de l’autoroute Yaoundé-Douala en 2014. D’autres témoins de l’accusation attendent leur tour de passage devant la barre du Tribunal criminel spécial (TCS). Ils ont pour rôle d’édifier les juges sur l’affaire des irrégularités décriées lors des opérations d’indemnisation des populations dans la localité de Lobo,

Les deux premiers témoignages annoncent les couleurs d’un procès controversé. C’est le constat qui ressort de l’audition devant le collège des juges du TCS de Marcel Noah Ekassi, qui a semblé se contredire ou plutôt nuancer les déclarations qu’il avait précédemment faites à l’information judiciaire. Tout le contraire de M. Engama, qui reste constant. Il déclare sans ambages que les opérations d’indemnisation des victimes des destructions causées par le tracé de l’autoroute Yaoundé-Douala, ont bel et bien été entachées de nombreuses irrégularités.

Animé par la détermination à régler le compte de ceux qu’il considère comme ses pires ennemis, M. Engama a été’ le premier à prendre la parole. Le témoin, dont les déplacements sont devenus pénibles à cause du poids de l’âge, se présente comme natif de la localité de Lobo, propriétaire de nombreuses terres, grand agriculteur et professionnel de la capture des animaux. Raison pour laquelle il a demandé aux avocats de la défense de simplifier leur langage en l’interrogeant.

Principal dénonciateur à l’origine de l’actuel procès, M. Engama a soutenu que la sous-commission de constat et d’évaluation dirigée par M. Abdou Kaïgama, l’ancien sous-préfet de l’arrondissement de Lobo, a fabriqué de faux documents pour intégrer dans la liste des bénéficiaires des indemnisations des personnes qui n’avaient pas de terres à Lobo. Pour lui, lesdites personnes ont injustement ou frauduleusement obtenu de grosses sommes d’argent. Il nomme, à titre d’exemple parmi les usurpateurs, M. François Bindzi Ebodé, le maire de la Commune de Lobo à l’époque des faits.

205 dossiers disparus

Ce dernier, dit-il, a reçu la somme de 46 millions de francs alors qu’il n’avait aucun lopin de terre sur l’emprise du tracé de l’autoroute en chantier. 11 précise que suite à une dénonciation, la Commission nationale anti-corruption (Conac) avait saisi de nombreux faux dossiers d’indemnisation dans le domicile de M. Bindzi Ebodé François. «Pendant que des intrus recevaient de fortes sommes d’argent, on ne m’a alloué que 1,7 millions de francs alors que j’attendais comme les autres plus de 25 millions de francs pour avoir perdu de nombreux plants de cacaoyers, de pruniers et autres», a déclaré le témoin.

Le témoin ajoute que les évaluations faites par Rainbow, la société chinoise recrutée à l’époque pour l’étude de l’impact environnemental du projet de construction de l’autoroute, ont été faussées par la sous-commission de constat et d’évaluation. Selon des informations puisées dans le décret d’indemnisation et d’autres recueillies auprès du cabinet chinois Rainbow, explique M. Engama, la faramineuse somme de 1,960 milliard de francs n’aurait pas été reversée aux bénéficiaires représentant près de 205 dossiers disparus. Ce sont ces irrégularités et bien d’autres qui l’ont poussé à dénoncer la sous-commission de constat et d’évaluation pour que la vérité éclate au grand jour, conclut le témoin.

Le deuxième témoin du parquet s’est montré pour sa part hésitant dans ses réponses. Marcel Noah Ekassi était un employé du cabinet chinois Rainbow. Sa mission consistait à négocier avec les populations victimes de certaines destructions de biens lors des travaux effectués par cette entreprise. Il assure avoir été licencié de Rainbow pour des raisons de suppression de postes et non pour un litige quelconque. 11 raconte qu’il n’a pris part qu’à la première réunion de sensibilisation organisée par la commission de constat et d’évaluation présidée par M. Simou Kamsu Patrick, le préfet de la Lékié, à l’époque des faits.

A la question de savoir si le sous-préfet, M. Abdou Kaïgama, lui avait interdit de prendre part aux réunions et travaux de sa sous-commission, il répond que cela n’avait pas été fait de manière formelle et ajoute que sa présence devenait gênante à cause de ses observations. Lors de son audition à l’enquête préliminaire, il avait déclaré qu’à partir du point kilométrique 10, la commission avait mis de côté l’évaluation initiale constituée de quelques bénéficiaires pour prendre en compte une seconde dans laquelle le nombre de personnes à dédommager a augmenté de manière exponentielle. Il n’a pas nié ces déclarations, mais il a dit qu’il ne pouvait pas accuser le sous-préfet d’avoir fait un faux.

Rappelons que c’est une «lettre de dénonciation» datée de 2017 adressée, entre autres, au ministre de la Justice par un «collectif des expropriés de l’autoroute» qui avait déclenché la procédure judiciaire en cours. Dans cette lettre copiée à plusieurs autorités, le collectif impute diverses fraudes aux membres de la sous-commission d’évaluation et de constat des biens expropriés dans l’arrondissement de Lobo. Le collectif estime que ce processus avait été émaillé de divers dysfonctionnements du fait des personnes membres de la sous-commission décriée, en majorité des fonctionnaires, qui sont renvoyées en jugement devant le TCS.»