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Actualités of Friday, 9 September 2022

Source: LA VOIX DES JEUNES N°0143

Enseignement secondaire: la région du nord sacrifiée, un journal dénude Nalova Lyonga

La ministre Nalova Lyonga La ministre Nalova Lyonga

Sur les dix régions que compte le Cameroun, 04 sont considérées officiellement comme étant des Zones d'Éducation Prioritaire à savoir : l'Extrême Nord, le Nord, L'Adamaoua Et l'Est. L’État du Cameroun ayant fait l'amère constat que ces zones rencontraient un retard en termes de sous-scolarisation par rapport aux autres régions, a décidé d'apporter un appui particulier à ces dernières, dans le dessein de leurs permettre de rattraper ce retard criard dont nous ferons l'économie de ne pas en donner les causes ici. Des mesures étatiques concernent au plan structurel ; La création des établissements scolaires, leurs ouvertures ; au plan infrastructurel, la construction des salles de classes, salles multimédias, des blocs administratifs, la dotation des tables bancs, l'aménagement des aires de jeux, des toilettes , des bibliothèques, du matériel de bureau, pédagogique et didactique, l’affectation des ou mutation en nombre important du personnel enseignant et membres de l'administration sans oublier la gratification et stimulation des apprenants afin que ces derniers s'intéressent davantage à l'éducation. Toutefois au-delà de cette batterie de mesures impressionnantes sur les papiers, ensuite implémentées sur le terrain, force est de reconnaître que depuis quelques années, l'État a de plus en plus du mal à remplir et tenir à ses engagements d'alors. Et cela à cause de certaines tares et leurs corollaires d'avatars qu'il serait important de relever ici avec force.

On pourrait pour cela relever l'immixtion intempestive de certains hommes politiques qui ont « les bras longs de jour comme de nuit » et qui amènent les responsables à prendre des décisions irrationnelles, à têtes chercheuses et très souvent fantaisistes notamment en termes de création des établissements scolaires. Vous verrez donc la naissance comme des champignons des établissements dans les mêmes villages.

Tenez par exemple dans le département du Mbéré, région de l'Adamaoua, il existe trois établissements dans deux villages distants d'à peine 6 kms dans lesquels on a créé deux CES et un CETIC pour une population d'environ 3.000 âmes et comme conséquence le CETIC pourtant créé n'a jamais ouvert depuis 2014, faute d'élèves. Or à 25 kms de là dans la ville de Meiganga, les autorités en charge du secteur éducatif et quelques fils du terroir de bonnes foi à travers leur association ASDDEM (Association pour le Développement du Département du Mbéré), font des pieds et des mains en vain afin que Yaoundé accorde un autre établissement supplémentaire pour juguler l'affluence. Car ceux existant sont de plus en plus débordés avec des effectifs pléthoriques.

De même, on peut évoquer les affectations fantaisistes sans une réelle prise en compte des doléances et besoins du terrain acheminés fidèlement via les délégations départementales et régionales . Un peu comme si on décidait d'aménager un terrain de tennis à coup de millions dans un village qui ne demande qu'un forage et dont les populations meurent faute d'eaux potables . Vous avez donc la mutation (affectation) des enseignants littéraires où on a plutôt besoin des enseignants scientifiques et vice-versa.

À côté de cela, vous avez des établissements avec pour seul enseignant permanent le chef d'établissement comme au CETIC de Gbazer, lui-même obligé de se plier en quatre ou de recourir aux pauvres populations pour avoir quelques vacataires. Plus graves encore vous avez donc des vacataires qui n'ont pas été moulés au nouveau système d'enseignement en vigueur appelé APC( Approche par les compétences) et très souvent ont du mal à pratiquer les activités d'enseignement-apprentissages selon les règles de l'art en facilitant aux apprenants l'acquisition des savoir-savant, savoir-faire et savoir-être.

Au finish, vous aurez donc des taux de réussite en deçà des espérances malgré la bonne volonté et des élèves et du personnel enseignant et des responsables de l'administration. Nous n'oublions pas que certains enseignants envoyés dans ces ZEP passent des mois, voire plusieurs années avant de percevoir leurs salaires à l'instar de notre compatriote de regretté mémoire Hamidou (10 ans) qui est passé de vie à trépas en enseignant sans toutefois goutter le fruit de son dure labeur.

En outre, au-delà des soucis managériales et organisationnels dans la gestion du personnel, on doit y ajouter une absence criarde des salles de classes ce qui amène les chefs d'établissements au-delà des textes à faire avec le contexte en scindant les salles de classes par des contreplaqués, en cloisonnant les salles de classes et en transformant les espaces vides entre ces salles en une nouvelle salle de classe , pas besoin de vous dire que dans certains établissements, les cours se font sous les arbres en plein air, faute de salles . Pour résoudre le problème lié à l'absence des blocs administratifs , certains chefs d'établissements transforment une salle de classes en plusieurs box séparés des contreplaqués, chaque box devenant ainsi un bureau pour les chefs de services(provisorat ,censorat, surveillance général, intendance…) . De même, à cause de l'absence des tables bancs, les élèves sont obligés de prendre cours assis à même le sol , sur les pierres pour certains , pour les plus chanceux, ils s'asseyent à 05, voire 07 par table-banc. Les aires de jeux mal aménagés rivalisent d'adresse avec les billons de patates des champs voisins. Le matériel didactique et pédagogique manquant le personnel enseignant se voit obligé de faire avec les moyens de bord. L'absence d'électricité, de forages , routes , réseau téléphonique, maison d’habitation, insécurité, centre de soins médicaux, pénurie alimentaire, sont le train quotidien des enseignants rencontrés dans ces ZEP.

Étaler tous les maux qui minent leurs vies et conditions de travails de ces enseignants dans ces finages pourrait nous prendre des jours . La lancinante question qui taraude nos esprits est celle de savoir : : Pourquoi a-t-on dépouillé le septentrion et la région de l'est de son personnel éducatif alors que ces régions sont censées être "privilégiées" vu qu'il s’agit des ZEP ? Comment peut-on sinistrer davantage pédagogiquement des zones déjà sinistrées par la sous-scolarisation ? À qui la faute et comment faire pour s’en sortir ? Nous n'allons pas tout rejeter sur l'État, toutefois il a une très grande responsabilité dans ce galimatias et situation sinistre, inique voire deshumanisante car c'est lui qui pense les plans de développement, est chargé de les implémenter via ses structures déconcentrées et gère la ressource humaine du secteur éducatif. C'est bel et bien Yaoundé qui fait tout, décide de tout. Comment peut-on en vouloir à un d'enseignant qui a passé plus de 10 ans à Kombo Laka, un village riche en ressources minières (or , diamants, fer...exploité par les chinois ), mais qui manque de tout (lumière, forages, pont sur le Lom, route , poste de sécurité , réseau téléphonique...) et qui décide de se faire muter ailleurs ? D'autant plus qu'il voit comment son jeune collègue qui, à peine sorti de l'école est venu juste prendre service et par la suite a immédiatement été muté en ville ? Un enseignant qui travaille dans de bonnes conditions peut-il chercher à aller voir ailleurs ? Un enseignant qui voit des jeunes à peine sortis des écoles de formation, parfois leurs élèves se faire nommer et devenir leurs chefs hiérarchiques sans véritable respect du profil de carrière, doiton lui en vouloir si ce dernier demande à être muté ailleurs après avoir passé plus d'une décennie dans ce village ?

Le simple fait d'assister à des séminaires en ville et se faire interpeller de manière moqueuse par ses promotionnaires des villes « Enseignants à vocation rurale » frustre plus d'un et les amènent également à migrer en zone urbaine vu qu'il n'y a pas à priori des enseignants condamnés à travailler en zones rurales ( Darack , Moloundou, Yamba, Yamboya, Kolofata, Dargala , Kalfou Sonkolon et ceux condamnés à exercer en zone urbaine( Yaoundé, Douala , Bafoussam...). Nous devons également relever que le corps enseignant est rempli d'opportunistes venus juste chercher le matricule et qui refusent de travailler dans ces ZEP préférant les villes , se donnent les moyens de réaliser leurs vœux par le truchement des c o m p t o i r s installés dans les services de gestions des personnels enseignants. Les solutions pour juguler la situation Au-delà donc de la chirurgie sans anesthésie effectuée pour connaître et comprendre la situation et les raisons profondes des départs massifs des enseignants des ZEP vers les métropoles(zones urbaines) , nous proposons quelques solutions de sorties de crises :

- La mise sur pied d'un plan urgent de développement des ZEP, Zones d'Éducation Prioritaire, avec en toile de fond l'aménagement des (routes, salles de classes , forages , lumière, réseau électronique, centre de santés, postes de sécurité, maisons d'habitation...)
- Une décentralisation de la gestion de la ressource humaine au niveau local, des délégations régionales et départementales qui sont mieux outillées pour faire les mutations, déploiements, redéploiements du personnel envoyés des écoles de formations.

- Accorder une prime spéciale aux enseignants des ZEP , des zones à risque.

- Redéployer les enseignants ayant déjà fait plus de 05 ans dans un établissement conformément aux textes en vigueur. Une sorte de rotation.

- Décongestionner le personnel enseignant en zone urbaine notamment à douala et Yaoundé vu qu'il y'a un trop plein d'enseignants dans ces villes qui sont sous-employés(04 heures de cours pour certains, soit une journée/semaine de travail) alors qu'il en manque énormément ailleurs.

- Revoir à la hausse l'appui financier du service central aux services déconcentrés (régions), car il est injuste que Yaoundé conserve 85% des ressources et qu'à peine 15% y aillent alors que le gros du travail est mené sur le terrain dans les établissements et non dans les bureaux climatisés.

- Les chefs des villages et élites dans les ZEP soient davantage plus impliqués dans les associations de parents d'élèves et enseignants afin d'apporter un appui tous azimuts au personnel enseignant, élèves et membres de l'administration.

Certaines associations à l'instar de L'ASDDEM (Association pour le Développement du Département du Mbéré), l'Association des Anciens élèves des Lycées et Collèges s'y mettent déjà avec des résultats probants. Nous croyons humblement que ces mesures aideront beaucoup à résoudre les problèmes rencontrés dans nos zones d'éducation prioritaire.