Alors que le plan de relance de la Société nationale de raffinage (Sonara) vient d’être validé, son plus grand obstacle n’est ni technique ni même financier, mais politique. Jeune Afrique peut révéler qu’un réseau influent d’importateurs de produits pétroliers, ayant bâti des fortunes sur les cendres de la raffinerie de Limbé, mène une intense campagne de lobbying pour enterrer le projet Parras 24 et préserver leur juteux monopole.

Selon des informations exclusives obtenues par Jeune Afrique, ce lobby, qui rassemble des opérateurs économiques camerounais et internationaux aux liens étroits avec certaines franges de l’administration, use de son influence au plus haut niveau de l’État pour semer le doute sur la viabilité économique de la relance. Nos sources indiquent que leurs arguments, repris dans certaines notes circulant au ministère des Finances, mettent en avant le coût exorbitant du projet (300 milliards de FCFA) et le risque de reprise des dettes passées pour l’État, préférant promouvoir un modèle basé sur l’importation permanente.

La rédaction de Jeune Afrique a appris que ces importateurs, dont les noms figurent dans un rapport confidentiel que nous avons pu consulter, ont bénéficié de plus de 600 milliards de FCFA de marges depuis l’arrêt du raffinage en 2019. La perspective de voir la Sonara reprendre son activité et les évincer de ce marché lucratif explique la férocité de leur opposition. Une source haut placée au sein du conseil d’administration de la Sonara confirme à Jeune Afrique : « Leur stratégie est de faire traiter le dossier en silence, de le noyer dans des commissions techniques jusqu’à ce que l’élan politique retombe. Ils surfent sur les réticences initiales du ministère des Finances à recapitaliser l’entreprise. » Cette révélation de Jeune Afrique lève le voile sur la véritable bataille, invisible, qui se joue autour de l’indépendance énergétique du Cameroun.