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Actualités of Wednesday, 14 December 2022

Source: www.camerounweb.com

Duel entre le sous-préfet et le maire : Qui diligente le développement au niveau local ?

Adamou Njifen, maire de Njimom Adamou Njifen, maire de Njimom

Une vidéo devenue virale fait le buzz sur la toile. On y voit le sous-préfet de Njimom déraper dans une violence verbale inouïe à l’endroit du maire de la localité, un élu de l’Union démocratique du Cameroun (Udc). A suivre les propos de l’administrateur civil, affirmer sans réserve que le développent de Njimon est son affaire, on sombre sur le coup dans l’inquiétude en ce qui concerne la cohabitation entre les deux autorités. A la lumière du Code général des collectivités territoriales décentralisées voté en 2019, on s’inquiète davantage des propos véhéments du sous-préfet, déterminés d’en découdre avec l’élu du peuple. Pourtant, le rapport entre les deux autorités est horizontal et non vertical. Ce qui implique la collaboration car elles agissent sous la supervision du préfet hiérarchiquement compétent. C’est le maire qui assure le développement en fonction des aspirations de ses concitoyens. « Si votre main vous gratte et que vous ne pouvez pas la couper, ne nous donnez pas l’occasion de couper (silence) ! Mesdames et messieurs, chères populations, le chef de l’Etat m’a envoyé à Njimom pas pour deux choses : pour promouvoir le développement de Njimom. Encadrer les nobles et dynamiques populations de Njimom. Loin des discours creux et évasifs. Je ne suis pas un politicien mais j’ai un parti politique au sein duquel je voudrais que tout digne fils de Njimom puisse militer : ce parti s’appelle le développement. En présence des colonels chevronnés, émérites, dignes fils de ce village, qui comprennent le sens du maintien de l’ordre et le rôle d’un sous-préfet dans une unité administrative, je voudrais déjà avertir pour la troisième fois et la dernière sommation du genre que je fais à quiconque veut me mettre au défi ici, puisqu’en maintien de l’ordre on dit qu’il fait trois sommations. J’en ai déjà fait deux, et après la troisième, nous verrons », lance le sous-préfet menaçant à l’endroit du maire. Il poursuit en en enfonçant : « au lieu de voler les populations, le rôle de l’élite, c’est de dire la vérité, c’est de participer de manière active au développement. Les affamés ne devraient pas vous demander de les suivre parce qu’ils ont faim, et ils ne vous donneront jamais rien. Cependant, je voudrais que ce soit clair, il n’y a pas deux capitaines dans un bateau. Et que je suis le seul capitaine dans le bateau de Njimom », conclut-il. Ces propos d’une extrême gravité et sévérité, doivent susciter un débat au sein de l’opinion pour que le curseur soit remis à sa place, pour que la balle soit remise au centre du terrain et soit ronde pour tous les joueurs à la lumière de la loi. Dans cette perspective, notre reporter a tendu le micro aux maires et élites dans d’autres localités. « Qui est à la manette pour assurer le développement dans une commune ou dans un arrondissement ? Le maire ou le sous-préfet ? », est in extenso la question posée. Les réponses sont sans appel, sans considération aucune d’appartenance politique. Pour finir le maire de Njimom explicite tous les contours de ce qui s’est passé. C’est désormais le préfet du Noun, à minima, qui devrait trancher ce nœud gordien perçu par beaucoup comme l’essence même de la difficile décentralisation au Cameroun. « Les entraves à la décentralisation éclatent en plein jour à Njimom. La face dissimulée des freins à la décentralisation s’expose », résume en deux phrases cette situation.


Réactions

Yannick Ayissi, maire Rdpc de Yaoundé 2
« Le maire assure les missions de développement… »

« Le maire bien sûr est celui qui diligente le développement de par les missions confiées à la commune par le Code général des collectivités territoriales décentralisées (Ctd). Le sous-préfet assure les missions de supervision et de coordination des structures administratives de l'Etat et aussi de maintien de l'ordre. Le maire quant à lui assure les missions de développement économique, social, sanitaire, culturel et sportif de son territoire ».

Jean Baptiste Atemengue, maire Rdpc de Ngoumou
« C'est le maire qui est en charge du développement local »

« C'est le maire qui est en charge du développement local en vertu des compétences transférées. Mais le sous-préfet représente cet État. En général ce sont des problèmes de personnes. Chacun doit jouer son rôle en principe. Il y a bien des sous-préfets et des maires qui travaillent main dans la main. Dans 95% des arrondissements. Les collectivités territoriales décentralisées (conseil régional et commune) et l'Etat central travaillent sur les mêmes territoires et au profit des mêmes populations. C'est la loi qui a réparti les compétences entre les trois entités et le principe d'exclusivité de ces compétences exercées par chacune de ces entités devrait limiter les conflits de personnes. La complémentarité des actions menées par chacune de ces entités doit aboutir à l'épanouissement des populations. Les problèmes personnels naissent des conflits d'intérêts, intérêts personnels forcément au détriment de l'intérêt général ».


Koupit Adamou, député Udc du Noun
« Un sous-préfet qui se dit le responsable du développement de l'arrondissement devrait réviser encore ses leçons »
« Il est incontestable que la responsabilité du développement d'une commune ou arrondissent relève de la responsabilité du Maire. C'est pour cela que c'est lui qui tient et pilote le Plan de déploiement local (Pdl) et pour ça on lui vote un budget dont il est l'ordonnateur. Le Sous-préfet est là pour coordonner les services déconcentrés de l'Etat et garantir le maintien de la paix, la sécurité, et la cohésion sociale pour ainsi faciliter le bon fonctionnement de toutes les institutions à l'échelle de l'arrondissement, la sécurité des hommes et de leur bien en s'appuyant sur les Fmo placées sous son autorité. Il n'assure même pas la tutelle du maire, c'est le préfet qui le fait. Un sous-préfet qui se dit être le responsable du développement de l'arrondissement devrait réviser encore ses leçons. Il n'a ni ressources ni compétence pour ça et c'est ce genre de confusion qui pousse aux abus qu'on observe malheureusement sur le terrain. Si dans notre pays chacun pouvait savoir rester sur son couloir, faire son travail en respectant les autres, notre cher et beau pays se porterait beaucoup mieux qu’il ne l'est aujourd'hui. Je profite d'ailleurs pour appeler notre gouvernement à se départir de certains discours ou termes hérités de la colonisation car non seulement ceux-ci sont obsolètes, mais aussi ils légitiment des abus inaccessibles. Quand on vient installer un sous-préfet, un préfet ou un gouverneur, on dit : Monsieur ou Madame tel... « Prenez le commandement ! ». Or aujourd'hui il s'agit de prendre le pouvoir et non le commandement.


Justin Noah, Secrétaire général adjoint du Mrc
« Il revient au Maire d’impulser le développement de l’arrondissement »
« Au regard de la loi sur les collectivités territoriales décentralisées de 2020, il revient au Maire d’impulser le développement de l’arrondissement. Le sous-préfet représente l’état sans toutefois être la tutelle du Maire ».
Jean Rober Wafo, ancien conseiller municipal du Sdf à Douala 5ème
« Le sous-préfet a quel budget pour développer une commune? »
« C’est la maire qui tient les manettes du développement. Le sous-préfet a quel budget pour développer une commune? La tutelle du maire c'est le préfet et non le sous-préfet qui est uniquement chargé du maintien de l'ordre et de la gestion des services déconcentrés de l'État. Encore que le préfet n'est que le représentant de la tutelle administrative qu'est le ministre de l’Administration territoriale. Puisqu'il y a une autre tutelle à savoir la tutelle financière (Minfi) à travers le receveur municipal ».


Interview d’Adamou Njifen, maire Udc de Njimom

Vous, Monsieur Adamou, dans quelles circonstances cette affaire est arrivée ?
« Le sous- préfet de Njimom a entrepris une tournée de prise de contact dans l'arrondissement de Njimom depuis bientôt plus d’une semaine. Nous avons été au lancement de cette tournée dans le village de Makam et Maloure. Lancement au cours duquel le maire que je suis a pris la parole pour souhaiter une fois de plus la bienvenue au nouveau sous-préfet récemment nommé par le chef de l’Etat à Njimom. A l’étape de Njimom, village d'où je suis natif et maire de la ville, nous avons préparé l’accueil du sous-préfet. Le programme initialement prévu a été changé, interdisant au maire de prendre la parole et en introduisant le mot d'une certaine élite inconnue des populations, qui de surcroit ne vit pas à Njimom depuis plusieurs années. L’élu du peuple que je suis, mandaté par les populations ne pouvait pas accepter qu'une telle forfaiture se passe à Njimom et séance tenante nous avons manifesté devant le sous-préfet notre désapprobation en empêchant à ce Monsieur de prendre la parole. Et c’est à ce moment que le sous-préfet a ordonné au commandant de brigade de me menotter et de me faire évacuer du site de la manifestation en me menaçant arme au poing de tirer sur moi comme vous avez pu le voir dans les vidéos qui circulent sur la toile. Voilà les circonstances dans lesquelles cette affaire est arrivée.

Qu'est-ce le sous-préfet vous reproche exactement?
Nous avons accueilli ce sous-préfet à bras ouverts à Njimom et avons démontré notre volonté et engagement à collaborer avec lui pour le bien-être des populations de notre localité et son développement. Mais nous sommes surpris que moins de 6 mois après il décide de faire du maire son ennemie numéro 1 comme vous pouvez l'entendre dans ses déclarations. Lui seul peut vous dire ce qu’il a contre le maire de Njimom. Et il est le troisième sous-préfet. Je suis maire depuis 2013 et il ne me souvient pas avoir eu un affrontement d’une ampleur pareille avec ces deux prédécesseurs. Nous disons qu’avec de tels comportements, la République est en danger et cela est étonnant que de telles pratiques se passent seulement dans le département du Noun où certains admirateurs se permettent dans les cérémonies officielles d’interdire la parole aux magistrats municipaux et d’introduire sans concertation aucune avec les maires des individus pour parler au nom des populations. Vous vous souvenez que la même scène s’est produite le 7 décembre 2021 lors de l’inauguration de l’adduction d’eau dans la ville de Njimom en présence du Minddevel et du directeur général du Feicom. J’avais alors saisi les autorités compétentes le 15 décembre et jusqu'aujourd’hui aucune réponse n’a été donnée. Et ce mutisme de ceux qui sont en charge de les recadrer continue ainsi de développer des frustrations qui à un moment ne peuvent plus être acceptées et dont nous ne pouvons plus les tolérer. C’est l'occasion pour nous ici d’appeler les populations de Njimom au calme et à leur dire de continuer de vaquer à leur occupation.
Que dites-vous de tout cela?
En ce qui nous concerne nous nous sommes toujours engagés dans le respect des lois de la République et de poursuivre inlassablement nos missions sociales dans le cadre du Syndicat des communes du Noun pour le développement de notre arrondissement. Nous savons très bien que le sous-préfet dit à tous ceux qui veulent l' entendre qu' il est en mission à Njimom et que rien ne se passera plus comme avant. La veille de cette tournée, nous avons appris qu'il a présidé une réunion avec certaines soit disant « élite » du Rdpc et c'est au cours de cette réunion qu’ils auraient décidé de ne pas me permettre de prendre la parole. Vous avez vu les images à la télévision devant la sous-préfecture montrant derrière le chef du village un certain Mongbet Ibrahim de réputation douteuse. A vous de tirer les conclusions de cette machination qui a abouti à ce que vous avez pu voir.