Actualités of Sunday, 10 August 2025
Source: www.camerounweb.com
Dans l'émission "Club d'Élites" sur Vision 4, le consultant politique Dieudonné Essomba a livré une analyse critique du modèle économique camerounais, dénonçant une concentration des richesses et des services dans les deux métropoles qui asphyxie le développement des autres régions.
L'économie camerounaise souffre d'un déséquilibre structurel majeur qui compromet ses perspectives de développement. C'est le diagnostic sans concession dressé par Dieudonné Essomba, consultant politique, lors de son passage dans l'émission "Club d'Élites" sur Vision 4. Son analyse met en lumière les dysfonctionnements d'un système économique qu'il qualifie de "tellement polarisé" qu'il rend impossible tout développement harmonieux du pays.
Les statistiques avancées par l'expert sont éloquentes : "Yaoundé et Douala, qui regroupent 30% de la population, concentrent 90% des guichets de financement, utilisent 95% de la masse monétaire." Cette concentration financière s'accompagne d'une centralisation administrative tout aussi préoccupante, avec "80% des agents publics" basés dans ces deux métropoles.
La conséquence de cette configuration est un écart de richesse saisissant : "un habitant de Yaoundé ou Douala est en moyenne 10 fois plus riche que le Camerounais moyen", révèle Dieudonné Essomba. Un différentiel qui illustre l'ampleur des inégalités territoriales au Cameroun.
Pour le consultant, ce modèle génère un cercle vicieux qui perpétue les inégalités régionales. "Le système a asséché les ressources qui peuvent mobiliser les facteurs de production dans les régions", explique-t-il, pointant du doigt les mécanismes qui privent les autres territoires des moyens de leur développement.
Cette situation pousse les populations des régions périphériques vers un exode économique parfois surprenant. Essomba cite l'exemple frappant de "des enfants qui prennent la moto à Kousseri et à Maroua, la mettre sur la voiture, pour venir faire le Ben-skin à Yaoundé et Douala." Une illustration concrète de la migration économique interne que génère ce déséquilibre territorial.
Une fonction publique insuffisante
L'analyse du consultant révèle également les limites structurelles de l'État camerounais. Avec "que 400 mille agents publics, même pas 3% de la population", l'administration publique apparaît sous-dimensionnée par rapport aux défis du pays.
"Comment voulez-vous que l'État joue un rôle macro-économique de relance de la consommation avec un tel modèle ?", s'interroge Essomba, soulignant l'incapacité de l'appareil étatique à impulser une dynamique économique d'envergure nationale avec des effectifs aussi réduits.
Cette analyse va au-delà de la simple critique conjoncturelle pour questionner les fondements même du modèle de développement camerounais. Selon Dieudonné Essomba, "quel que soit celui qui gère un tel pays, ne peut pas le développer" tant que cette configuration structurelle perdure.
Le consultant pointe ainsi du doigt une responsabilité qui dépasse les individualités pour interroger l'architecture même du système économique et administratif hérité de décennies de centralisation excessive.
Cette analyse intervient dans un contexte où la question de la décentralisation et du rééquilibrage territorial reste un enjeu majeur des débats politiques camerounais. Elle souligne l'urgence de repenser la répartition des ressources et des activités économiques sur l'ensemble du territoire national.