Actualités of Friday, 28 November 2025
Source: www.camerounweb.com
Le sous-préfet de Yaoundé IV interdit la convention qui devait entériner le leadership du chef de l'opposition
Coup de théâtre dans la vie politique camerounaise. À 48 heures de la tenue de sa convention extraordinaire, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) se voit opposer une interdiction formelle de la part du sous-préfet de l'arrondissement de Yaoundé IV. Cette décision, notifiée par arrêté le 27 novembre, empêche de facto le retour programmé de Maurice Kamto à la présidence du principal parti d'opposition camerounais.
L'autorité administrative invoque les risques de "menace grave de trouble à l'ordre public" pour justifier cette interdiction. Un motif classique mais qui intervient à un moment particulièrement sensible pour le MRC, contraint d'annoncer par la voix de son président par intérim, Mamadou Mota, le report de l'assemblée à "une date ultérieure".
Ce blocage administratif représente un revers majeur pour la formation politique qui avait soigneusement orchestré cette convention du 29 novembre comme l'acte de renaissance de son organisation après la séquence électorale présidentielle d'octobre dernier.
Pour comprendre les enjeux de cette convention avortée, il faut revenir sur le parcours sinueux de Maurice Kamto ces derniers mois. En juillet 2025, le leader historique du MRC avait quitté la présidence de son parti pour des raisons strictement légales : ne disposant pas d'élus locaux, le MRC ne pouvait investir de candidat à l'élection présidentielle.
C'est donc sous les couleurs du Manidem d'Anicet Ekane que Maurice Kamto s'est présenté à la présidentielle d'octobre, après avoir pris formellement sa carte dans cette formation. Pour éviter toute double appartenance partisane, il avait alors cédé les rênes du MRC à son premier vice-président, Mamadou Mota.
La convention du 29 novembre s'annonçait comme une simple formalité. Malgré l'ouverture théorique des postes du directoire à la concurrence, Maurice Kamto était le seul candidat déclaré à la présidence du MRC. Son retour à la tête du parti ne faisait donc aucun doute, cette assemblée devant simplement refermer la parenthèse ouverte par son départ stratégique lors de la présidentielle.
L'interdiction administrative transforme cette simple formalité en crise politique, plongeant le MRC dans une période d'incertitude alors même qu'il cherchait à clarifier sa direction et son organisation interne.
Le timing de cette interdiction n'est pas anodin. Pour le MRC, cette convention constituait une étape cruciale dans la préparation des élections législatives et municipales prévues en 2025. Le parti entendait se réorganiser, consolider ses structures et affûter sa stratégie électorale en vue de ces scrutins locaux décisifs.
Le blocage administratif intervient donc à un moment charnière, empêchant le principal parti d'opposition de se restructurer à l'approche d'un cycle électoral majeur. Une situation qui pose inévitablement la question de la neutralité de l'administration dans le processus démocratique.
Du côté du pouvoir en place, les motivations de cette interdiction apparaissent également avec clarté. Les élections locales de 2025 s'annoncent particulièrement difficiles pour le parti au pouvoir, dont les récents résultats électoraux témoignent d'un affaiblissement marqué.
La présidentielle d'octobre dernier a été éloquente : le parti présidentiel y a enregistré son plus mauvais score depuis plus de trente ans, révélant une érosion significative de sa base électorale. Dans ce contexte, maintenir le MRC dans une situation d'instabilité organisationnelle apparaît comme un avantage stratégique non négligeable.
Le MRC se retrouve donc face à un dilemme : accepter ce report sine die ou contester cette décision administrative devant les juridictions compétentes. La direction du parti devra également gérer l'incertitude institutionnelle créée par ce blocage, alors que Mamadou Mota ne devait occuper qu'une présidence transitoire.
Pour Maurice Kamto, ce nouveau coup d'arrêt administratif rappelle les obstacles récurrents auxquels son parti est confronté depuis sa création. Cette interdiction s'inscrit dans une longue série de tensions entre le MRC et les autorités, marquée par des manifestations réprimées, des emprisonnements de leaders et des restrictions diverses à l'activité du parti.
Au-delà des considérations partisanes, cette affaire pose des questions fondamentales sur l'état de la démocratie au Cameroun. Le droit pour un parti d'opposition de tenir ses instances statutaires est un principe démocratique élémentaire. Son interdiction, même justifiée par des motifs d'ordre public, interroge sur l'espace réellement accordé au pluralisme politique dans le pays.
Alors que le Cameroun se prépare à un nouveau cycle électoral, cette interdiction envoie un signal préoccupant sur les conditions dans lesquelles se dérouleront les futures consultations. Les observateurs de la vie politique camerounaise suivront avec attention les développements de cette affaire qui pourrait définir le ton des mois à venir.