Depuis le lundi 11 août, une intense activité diplomatique se déploie au Palais de l'Unité. Ferdinand Ngoh Ngoh, Secrétaire général de la Présidence de la République (SGPR), multiplie les audiences avec des personnalités influentes du pays dans ce qui s'apparente à une véritable offensive de mobilisation en faveur du candidat Paul Biya.
L'opération a débuté lundi avec la réception d'une délégation d'imams du Conseil des imams et dignitaires musulmans (CIDIMUC), menée par l'imam Moussa Oumarou. Officiellement venus "témoigner de leur soutien et prier pour le pays", ces dignitaires religieux ont marqué le coup d'envoi d'une séquence politique soigneusement orchestrée. Cette première rencontre avec les représentants de la communauté musulmane camerounaise s'inscrit dans une démarche de rassemblement confessionnel visant à mobiliser l'électorat sur des bases religieuses et communautaires.
L'Église catholique et les chefs traditionnels de l'Ouest entrent en scène
Le mardi 12 août, Ferdinand Ngoh Ngoh a intensifié le rythme avec deux audiences d'envergure. Dans l'après-midi, le SGPR a d'abord accueilli une délégation d'évêques de l'Église catholique romaine du Cameroun, institution particulièrement influente dans le paysage sociopolitique camerounais. Cette rencontre a été immédiatement suivie par la réception d'une délégation de chefs traditionnels de la région de l'Ouest, territoire politiquement stratégique et historiquement disputé. Selon nos informations, ces deux groupes sont venus réaffirmer leur "indéfectible soutien" à la candidature de Paul Biya pour un huitième mandat.
Cette succession rapide d'audiences révèle une stratégie politique méthodique. En s'appuyant sur les trois piliers traditionnels d'influence au Cameroun - les autorités religieuses musulmanes, l'Église catholique et la chefferie traditionnelle -, le pouvoir en place cherche à consolider une base électorale large et diversifiée. Le choix de Ferdinand Ngoh Ngoh comme orchestrateur de ces rencontres n'est pas anodin. En sa qualité de SGPR et de président du Comité stratégique de la campagne de Paul Biya, il incarne la parfaite symbiose entre l'appareil d'État et la machine électorale du candidat sortant.
Ce ballet d'audiences soulève néanmoins des interrogations légitimes sur la neutralité des institutions religieuses et coutumières dans le processus électoral. La mobilisation simultanée de ces différents corps constitués interpelle sur leur capacité à maintenir une distance critique vis-à-vis du pouvoir politique. L'influence considérable de ces dignitaires auprès de leurs communautés respectives - fidèles musulmans, catholiques et sujets des chefferies - transforme leurs prises de position en enjeux électoraux majeurs, susceptibles d'orienter significativement les choix de vote.
Bien que la campagne électorale officielle ne soit pas encore ouverte, ces rencontres s'apparentent déjà à une mobilisation pré-électorale assumée. Le fait que Ferdinand Ngoh Ngoh cumule les fonctions de SGPR et de responsable de campagne illustre la porosité entre les ressources de l'État et les moyens de la candidature de Paul Biya. Cette démarche s'inscrit dans un contexte particulièrement favorable au pouvoir sortant, alors que l'opposition camerounaise peine toujours à présenter un front uni face au candidat en exercice.
L'efficacité et la rapidité de cette opération de mobilisation témoignent d'une machine politique parfaitement huilée. En l'espace de deux jours, le Palais de l'Unité a réussi à fédérer autour de la candidature Biya des personnalités représentatives des principales sensibilités religieuses et traditionnelles du pays. Cette capacité de mobilisation rapide constitue un atout considérable pour la campagne du candidat sortant, qui peut ainsi compter sur des relais d'influence structurés et enracinés dans le tissu social camerounais.
Ces premières manœuvres pré-électorales dessinent les contours d'une campagne où les rapports de force semblent déjà largement déséquilibrés. Tandis que l'opposition continue de buter sur ses divisions internes, le camp Biya déploie méthodiquement une stratégie de rassemblement qui pourrait s'avérer décisive pour l'issue du scrutin d'octobre.