Actualités of Tuesday, 2 December 2025
Source: www.camerounweb.com
La mort en détention d'Anicet Ekane révèle un système judiciaire camerounais à deux vitesses. Alors que d'anciens hauts responsables accusés de détournements colossaux bénéficient de conditions de détention privilégiées, le président du MANIDEM s'est éteint dans l'indifférence des autorités, privé de soins malgré son état de santé critique. Une disparité de traitement qui interroge sur la nature même de la justice au Cameroun : sanctionne-t-elle davantage les idées que les actes de corruption ?
LE COMMENTAIRE DE LA RÉDACTION - TRIBUNAUX À DEUX VITESSES : LE CHAMPAGNE POUR LES VOLEURS, LA MORT POUR LES NATIONALISTES.
Pendant que certains anciens hauts responsables de l’État, poursuivis pour des détournements chiffrés en milliards, déambulent dans les couloirs du Tribunal criminel spécial en costume sur mesure, rient à pleines dents et parfois boivent du champagne comme Edgar Alain Mebe Ngo’o, d’autres, comme Anicet Ekane, meurent dans l’ombre, dans des conditions de détention indignes d’un État de droit. Deux poids, deux mesures. À Mebe Ngo’o, ancien ministre, on accorde le luxe du confort en détention, une communication facilitée avec ses avocats, et même des aménagements jugés “humains”. À Anicet Ekane, leader politique, penseur indépendant, nationaliste engagé, on refuse les soins médicaux, on le garde au secret, on laisse son corps s’éteindre à petit feu, au mépris des alertes lancées par ses proches et sa formation politique.
Que reprochait-on vraiment à Ekane ? D’avoir exprimé librement ses idées ? D’avoir manifesté pacifiquement ? D’avoir osé dire que le Cameroun mérite une autre voie que celle de la confiscation du pouvoir et de la misère populaire ? Alors que les criminels économiques qui ont saigné les caisses de l’État plaident tranquillement, Anicet Ekane a été privé de tout : de liberté, de soins, de justice, et enfin, de vie. Sa mort en détention n’est pas un accident. Elle s’inscrit dans une longue lignée de morts suspectes et silencieuses dans les prisons du pays : le journaliste Bibi Ngota, et tant d’autres, dont les noms s’effacent à mesure que les années passent. Des hommes arrêtés, enfermés, puis réduits au silence définitif dans une indifférence institutionnelle glaçante.
Il y a urgence à briser le silence. Car ce qui s’est passé avec Anicet Ekane pourrait arriver à tout autre opposant politique demain. Ce drame soulève une question fondamentale : dans quel pays vivons-nous, où voler l’argent public est plus toléré que défendre la liberté ? Il ne s’agit plus seulement d’une injustice individuelle. Il s’agit d’un système. Un système qui protège les voleurs et broie les patriotes. Un système qui encourage la corruption et punit la conviction. La nation camerounaise doit se lever, non pas pour pleurer seulement Ekane, mais pour dire plus jamais ça. Pour que les prisons ne soient plus des couloirs de la mort pour les opposants. Pour que la justice cesse d’être un instrument politique. Anicet Ekane ne doit pas mourir pour rien. Son combat, sa voix, doivent résonner plus fort aujourd’hui. Car le vrai crime, c’est de laisser les fossoyeurs de la République se pavaner pendant que meurent ceux qui croient encore au Cameroun.