Actualités of Friday, 7 November 2025
Source: www.camerounweb.com
Dans une enquête exclusive publiée le 7 novembre, le magazine Jeune Afrique lève le voile sur la stratégie de long terme d'Issa Tchiroma Bakary. L'opposant camerounais ne cache plus son intention de reproduire au Cameroun le scénario ivoirien de 2010-2011, qui avait vu Laurent Gbagbo perdre le pouvoir malgré une prestation de serment contestée.
Jeune Afrique révèle le sens caché d'un message publié le 29 octobre sur Facebook par Issa Tchiroma Bakary. « Qu'ils se réjouissent, qu'ils dansent — cela ne fait que commencer : la troisième étape commence bientôt », avait écrit l'ancien ministre à propos de Paul Biya et du RDPC.
Selon l'analyse du magazine panafricain, cette déclaration constitue « une référence voilée à la Côte d'Ivoire », seul pays du voisinage proche correspondant à la description faite par Tchiroma Bakary. Le parallèle est troublant : en décembre 2010, le Conseil constitutionnel ivoirien avait proclamé Laurent Gbagbo vainqueur, alors que la Commission électorale indépendante avait déclaré Alassane Ouattara gagnant quelques jours plus tôt.
Jeune Afrique rappelle que Laurent Gbagbo avait bien prêté serment en 2010, exactement comme Paul Biya vient de le faire le 6 novembre. Mais l'histoire ivoirienne s'était terminée de manière dramatique : le président déchu avait été arrêté en avril 2011, « à l'issue d'une longue et meurtrière crise post-électorale ».
Cette référence historique, décryptée par le magazine, prend tout son sens quand on connaît la position actuelle de Tchiroma Bakary. Depuis son exil au Nigeria, révèle Jeune Afrique, l'opposant « entend inscrire son action dans le temps long », parlant ouvertement d'« une crise postélectorale à durée indéterminée, à l'issue de laquelle il espère parvenir au pouvoir ».
Dans son enquête, Jeune Afrique mentionne également un autre précédent troublant dans la sous-région. En Centrafrique, François Bozizé avait été réélu et proclamé vainqueur par le Conseil constitutionnel en 2011 dans un climat de contestation. Deux ans plus tard, il était renversé par la Séléka après plusieurs mois de guerre civile.
Le magazine souligne que lors de ces deux crises – ivoirienne et centrafricaine – Issa Tchiroma Bakary occupait le poste de porte-parole du gouvernement camerounais. Cette expérience lui confère une connaissance intime des mécanismes de déstabilisation post-électorale qu'il semble aujourd'hui vouloir reproduire.
Les « villes mortes », première étape d'un plan à long terme
Jeune Afrique révèle que les opérations « villes mortes » qui paralysent les régions camerounaises depuis début novembre ne sont que le début d'une stratégie plus vaste. Selon le magazine, Tchiroma Bakary « entend répéter » ces opérations « dans les prochains mois », maintenant ainsi une pression constante sur le régime.
Depuis sa base au Nigeria, « non loin de la frontière avec son pays » précise Jeune Afrique, l'opposant continue d'« inciter ses partisans à rester mobilisés, malgré les arrestations et le vent de répression qui souffle ».
Dans son discours d'investiture du 6 novembre, Paul Biya a appelé à une « union sacrée ». Mais selon l'analyse de Jeune Afrique, celle-ci est « loin d'être gagnée ». Le magazine note l'ironie de la situation : alors que « les élus du RDPC [...] avaient un seul souhait : montrer au monde l'image d'un Cameroun uni », la réalité sur le terrain est tout autre.
La révélation par Jeune Afrique de la stratégie de long terme de Tchiroma Bakary jette une lumière crue sur l'avenir immédiat du Cameroun. En évoquant explicitement les précédents ivoirien et centrafricain, l'opposant ne laisse aucun doute sur ses intentions : il ne s'agit pas d'une simple contestation électorale, mais bien d'une stratégie d'usure visant à reproduire les scénarios qui ont abouti au renversement de dirigants dans la sous-région.
L'enquête de Jeune Afrique soulève une question cruciale : le Cameroun est-il condamné à revivre les tragédies ivoirienne ou centrafricaine ? La référence à ces crises, qui ont fait des milliers de morts et plongé ces pays dans le chaos, n'est pas anodine. Elle témoigne de la détermination de Tchiroma Bakary, mais aussi des risques immenses qu'une telle stratégie fait peser sur la stabilité du pays.
Alors que ses avocats préparent une offensive judiciaire internationale, comme le révèle Jeune Afrique, l'ancien ministre semble avoir fait le choix de la confrontation totale, quitte à mener le Cameroun vers une crise prolongée dont personne ne peut prédire l'issue.