Dans son allocution le 6 novembre 2025, le président réélu Paul Biya a avoué que le processus électoral n’a pas été paisible. Reconnaissant les pertes humaines, il a adressé ses « sincères condoléances aux familles des victimes ». Les blessés ont également eu droit aux « souhaits de bon rétablissement ». Le chef de l’État a par ailleurs tenu à féliciter les forces de défense et de sécurité pour leur courage, leur abnégation et leur professionnalisme.
Ces qualités ont permis de « maîtriser » la situation, selon Paul Biya. Une situation qu’il a résumée en « scènes de pillage et de vandalisme d’une violence inouïe », mais aussi en « incendies », « destructions des biens publics et privés », « attaques contre les forces de l’ordre » et « pertes en vies humaines ». Certains manifestants ont contesté sa réélection, revendiquant la victoire de l’opposant Issa Tchiroma Bakary qui s’est déclaré vainqueur avant la proclamation des résultats.
Des opposants politiques ont été mis aux arrêts : Anicet Ekane, Djeukam Tchameni ou encore le Pr Aba’a Oyono. D’aucuns ont évoqué la situation des droits humains qui, selon eux, a été ignorée par les autorités camerounaises. Ils font notamment référence de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ou encore de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
Ces traitements qualifiés d’inhumains et dégradants ont été dénoncés par Me Thierry Njifen, coordonnateur du collectif de 149 avocats qui assistent gratuitement les personnes interpelées dans le cadre des tensions postélectorales. Selon deux officiels de l’ONU cités sous anonymat par l’agence de presse Reuters, il y a eu 48 morts dont 45 civils et 3 gendarmes. Cette annonce a été reprise par plusieurs médias au Cameroun et à l’étranger. Des organisations de la société civile camerounaise ont également dressé un bilan provisoire. 39 civils tués ont été recensés à la date du 4 novembre par le collectif des avocats bénévoles. Une semaine auparavant, l’organisation Stand Up For Cameroon indiquait que 23 personnes avaient perdu la vie dans la répression menée par les forces de défense et de sécurité contre les manifestants.
Quant aux officiels de l’ONU cités par l’agence Reuters, la moitié des décès ont été enregistrés dans la région du Littoral, principalement à Douala, le chef-lieu. Cette ville, réputée frondeuse, est aussi la capitale économique du Cameroun. Elle a connu la répression la plus dure du pays. Le gouverneur du Littoral a évoqué plusieurs morts sans aucune précision. Les officiels onusiens recensé 10 morts dans la région du Nord.
C’est aussi la ville d’origine de l’opposant Issa Tchiroma Bakary qui continue de revendiquer la victoire. Mais depuis des jours, le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji effectue des visites dans quelques villes ayant connu des violences post-électorales. À Douala, le 12 novembre 2025, le membre du gouvernement a rencontré le gouverneur du Littoral, Samuel Ivaha Diboa, ainsi que les responsables des forces de défense et de sécurité.
Objectif affiché : dresser un état des lieux précis des troubles qui ont secoué la capitale économique et réaffirmer la main ferme de l’État face aux contestations. Selon les chiffres communiqués par le Minat, 829 personnes ont été interpellées lors des manifestations post-électorales, dont 26 femmes et 36 mineurs. Un bilan qui traduit l’ampleur des débordements mais qui interroge aussi sur la réponse sécuritaire. Paul Atanga Nji a fustigé les « pyromanes politiques » qu’il accuse de « manipuler des enfants âgés de 12 à 14 ans à des fins de déstabilisation ».
Le ministre a prévenu que la justice poursuivra les instigateurs, dénonçant des actes « égoïstes et anti-républicains ». Paul Biya a récemment mis lui aussi en garde tous ceux qui attisent la "haine", en particulier ceux de la diaspora. Le président déclaré élu a, en effet, publié mercredi dernier, un message, sur sa page officielle Facebook. Alors que le Cameroun vit sous tension après les manifestations post-électorales, le président Paul Biya semble envoyer un avertissement : "J’en appelle au sens des responsabilités des uns et des autres. Je m’adresse à tous ceux qui s’emploient à attiser la haine et la violence dans notre pays, notamment à certains de nos compatriotes de la diaspora."









