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Actualités of Mardi, 26 Septembre 2017

Source: cameroon-info.net

Crise anglophone: Haman Mana fustige la position de Paul Biya

Haman Mana, directeur de publication du journal Le Jour Haman Mana, directeur de publication du journal Le Jour

Haman Mana parle de la crise anglophone qui prend des proportions inquiétantes. Dans l’éditorial publié dans l’édition du journal Le Jour du lundi 25 septembre 2017 le directeur de publication présente la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Il fustige l’attitude du gouvernement qui a toujours nié l’existence d’un problème anglophone et la répression servie aux protestataires. Il critique la relative indifférence des camerounais francophones « qui n’ont pour seul souci que la quiétude nécessaire pour aller manger du poisson à la braise le soir, le tout arrosé de bière fraîche, ils posent sans cesse la question : « Que veulent-ils » ? Réponse d’Haman Mana : « ils veulent vivre ans un pays normal ».

Voici dans son intégralité l’éditorial du directeur de publication du quotidien Le Jour

"Un pays normal"

Voilà bien un an que cela dure. Ce que l’on appelle en se pinçant les narines « la crise anglophone » vient de connaître une escalade significative ces derniers jours, avec des manifestations massives et coordonnées, suivies de ripostes de forces de l’ordre. Cela se voit, cela se sent, chaque jour, on fait un pas de plus vers le précipice.

C’est dans le discours que se remarquent les étapes de l’évolution de cette crise : dans un premier temps, à Yaoundé, on a d’abord dit « il n’y a pas de crise Anglophone ». La crise durant, le discours est devenu « Les problèmes qu’ils posent sont les mêmes dans tout le Cameroun ». La crise perdurant, on se demande désormais : « que veulent-ils » ?

La réponse du gouvernement est passée par toutes les étapes classiques de gestion de crises, à la camerounaise : dans un premier temps, on a pensé qu’en corrompant les chefs traditionnels, ils auraient prise sur des populations qu’on sait respectueuses des traditions. Ensuite, on a agité un vieux démon camerounais, celui de la fracture ethnique, en faisant le distinguo entre anglophones « Grassfields » du Nord Ouest et anglophones « Sawa du Sud-ouest ». Enfin, on s’est remis à une bonne vieille méthode, celle qui a fait son effet pendant les « années de braise », le pourrissement, c’est à dire l’essoufflement de la contestation. Tout cela dans une atmosphère de répression dont la gradation monte de jour en jour. Mais la « crise » ne finit toujours pas…

Beaucoup de mesures ont été prises, de concessions faites et comme on le voit, toutes ces institutions créées, tous ces postes de nominations concédés ont été autant de cautères sur une jambe de bois.

Installés dans leur confort relatif de camerounais francophones, qui n’ont pour seul souci que la quiétude nécessaire pour aller manger du poisson à la braise le soir, le tout arrosé de bière fraîche, ils posent sans cesse la question : « Que veulent-ils » ? S’excluant ainsi d’emblée de ces questions qui, même si elles sont exprimées en langue anglaise, n’en demeurent pas moins des préoccupations vives, pour la vie camerounaise aujourd’hui :

-La gouvernance au Cameroun favorise-t-elle (ou prend-t-elle en compte) le bien être de tous les camerounais ?
-Les institutions prévues dans la Constitution de 1996, qui devaient garantir la décentralisation, c’est à dire la concession aux populations de questions de développement concernant leur environnement immédiat ont-elles jamais été mises en place ?
-Des élections sincères, au cours desquelles le citoyen du Cameroun décide de qui occupera telle fonction sont-elles possibles à ce jour ?
- Dans quelles circonstances s’achèvera le long règne de M. Biya et qu’adviendra-t-il du système qui s’est mis en place ?

Que veulent-ils ? Eh bien, ce sont des réponses à ces questions, qui devraient tarauder à chaque instant tout citoyen camerounais digne et soucieux de l’avenir de son pays.

Que veulent-ils ? Eh bien, Ils veulent, un pays où les gens sortent de leur maison, travaillent, et le soir venu, ont accès au fruit de leur labeur quotidien, sans avoir à en laisser dans les mains d’un fonctionnaire prédateur qui les ponctionne. Ils veulent un pays où, lésé, vous pouvez aller dans les Cours et Tribunaux, et y rencontrer Justice. Ils veulent un pays où ils seront traités en citoyens et non en sujets ou en objets. Ils veulent d’un pays où on édicte des règles applicables et respectées par tous. Ils veulent d’un pays où ceux qui gouvernent disent ce qu’ils font et font ce qu’ils disent…Ce pays là, c’est ce pays NORMAL, que nous évoquons tous dans nos conversations quotidiennes, et dans lequel nous souhaitons vivre.

Eh bien Que veulent-ils ? Ils veulent vivre dans un pays NORMAL.

Haman Mana