Jean Paul Ntsengue, expert sénior des questions électorales et politiques, a publié un texte titré illustration parfaite du "droit du quartier". Dans celui-ci, il donne un exemple.
Maitre Christian Ntimbane Bomo est avocat et pasteur. Dans cet article juridique, il doit confondre exégèse juridique et exégèse biblique car, je ne vois aucune logique ni dans son interprétation de la loi, ni dans l'application qu'il en fait s'agissant de l'exigence des 300 signatures que le Code électoral impose au candidat indépendant ou à celui qui est investi par un parti politique n'ayant pas d'élu(s). Son texte est le fruit d'un juridisme de mauvais goût.
L'évocation hors de propos de principes généraux du Droit et de théories juridiques (circonstances exceptionnelles dérogatoires au Droit applicable, fait du Prince), démontre qu'il a mal assimilé son cours de Droit constitutionnel appris en 1ère année, il y a longtemps. Le fait qu'il soit privatiste aussi ne l'aide pas beaucoup. Et quand je vois les gens l'encenser sous ce post, je comprends pourquoi le juriste du village est célébré comme le plus grand savant du domaine. Prenons les deux cas évoqués par Ntimbane Bomo.
À quoi s'applique l'effet dérogatoire de la théorie des circonstances exceptionnelles dans le cas de la prorogation des mandats ?
Dans le cas de la prorogation des mandats des députés et des conseillers municipaux, les circonstances exceptionnelles évoquées pour justifier le report, pèsent sur la date desdits scrutins et non sur la validité des mandats prorogés. Ceci veut dire que le décret de prorogation est dérogatoire au calendrier électoral préexistant, lui-même établi conformément à la loi existante, et non à la validité des mandats pendant la période de prorogation. J'espère que c'est clair pour tout le monde. Les députés et conseillers municipaux dont les mandats ont été prorogés conservent donc une signature légale valable jusqu'à la fin du mandat prorogé.
Le décret présidentiel portant prorogation des mandats des députés et des conseillers municipaux est-il un fait du prince ?
La réponse est immédiate et sans appel : Non ! Le fait du Prince au temps des Rois, était une prérogative royale qui permettait au monarque de prendre une décision arbitraire et abusive dans une matière où la loi n'interdisait pas cet acte de manière explicite. Ainsi, le Roi pouvait décider en pointant une jeune fille célibataire dans la rue, de la prendre pour femme (il paraît que cette pratique est encore en vigueur dans certaines monarchies traditionnelles camerounaises). Tant que la pratique n'était pas expressément interdite et opposable au Roi, il pouvait ainsi décider.
À la lumière de cette définition, on constate aisément qu'il n'y a pas eu "Fait du Prince", parce que le President Paul Biya, que l'on sait légaliste, a pris son décret de prorogation en vertu de la loi (article 15(4) de la Constitution et article 170 du Code électoral).
Conclusion
Ces juristes du quartier et du village nous font perdre du temps et de l'énergie dans des débats inutiles. Peut-être pour justifier les levées de fonds et autres soutiens obscurs. Pensent-ils réellement que leurs candidatures sont sérieuses et qu'ils seront candidats dans les conditions qu'ils présentent ? Je crois que non ! Pourquoi donc font-ils cela ? C'est à eux de répondre. Quand je parlais de conquête intellectuelle du pouvoir, il s'agissait d'une exploitation de la législation électorale applicable pour faire échouer toute tentative d'abus ou de fraude. Les moyens juridiques existent. Malheureusement, le peuple n'écoute que le chant des sirènes menteuses.