Actualités of Tuesday, 28 October 2025
Source: www.camerounweb.com
Treize personnes ont été condamnées mardi par le tribunal militaire de Yaoundé pour avoir tenté d'accéder à une audience pourtant ouverte au public du Conseil constitutionnel. Une décision qui interroge sur la notion même d'audience publique dans le pays.
C'est un verdict qui laisse perplexe. Dans la matinée de ce mardi 28 octobre 2025, le tribunal militaire de Yaoundé a condamné 13 personnes à un mois d'emprisonnement ferme et au paiement d'une amende de 34 500 FCFA chacune. Leur tort ? Avoir tenté d'assister à une audience publique du Conseil constitutionnel le 4 août dernier.
« Les victimes d'arrestations arbitraires du Conseil constitutionnel qui séjournaient au groupement de gendarmerie ont été condamnées ce matin sans débats à un mois d'emprisonnement », a dénoncé Maître Hippolyte Meli, coordonnateur du Collectif Sylvain Souop, un collège d'avocats qui suit le dossier.
Ces 13 personnes avaient été arrêtées il y a près de deux mois, alors qu'elles cherchaient à accéder à la salle d'audience du Conseil constitutionnel installée au Palais des congrès de Yaoundé. L'institution examinait ce jour-là le contentieux préélectoral de la présidentielle 2025, une audience censée être publique conformément aux principes de transparence judiciaire.
Détenues depuis le 4 août au groupement de gendarmerie de Yaoundé, ces personnes ont vécu une odyssée judiciaire kafkaïenne. Elles avaient pourtant bénéficié d'une mise en liberté sous caution de 50 000 FCFA, somme qu'elles ou leurs proches avaient payée. Malgré cette caution, elles sont restées incarcérées jusqu'à ce procès express de mardi matin.
Le paradoxe est saisissant : condamnées à un mois de prison, elles en ont déjà purgé deux en détention préventive. « Tout le monde est libre à ce jour », a précisé Nana Paul Sabin, observateur de la scène judiciaire camerounaise.
Ces 13 condamnés ne sont pas les seuls à avoir été arrêtés dans ces circonstances. Une dizaine d'autres personnes, interpellées le même jour dans le même contexte, avaient été libérées après 40 jours passés au commissariat central numéro 1 de Yaoundé. On ignore pourquoi ces dernières ont échappé aux poursuites, tandis que les 13 autres ont été déférées devant le tribunal militaire.
Cette affaire soulève une question fondamentale : que signifie une "audience publique" si le public ne peut y accéder ? Le caractère public des audiences judiciaires est pourtant un principe universel du droit, garantissant la transparence de la justice.
En pleine période de tensions post-électorales au Cameroun, marquées par des violences meurtrières et des centaines d'arrestations à travers le pays, cette condamnation apparaît comme un signal inquiétant sur l'état des libertés publiques et du droit d'accès à l'information judiciaire.
Le Collectif Sylvain Souop a annoncé qu'il étudiait les possibilités de recours contre ce qu'il qualifie d'« arrestations arbitraires » et de déni de justice.
Depuis le début de la campagne présidentielle, le Conseil constitutionnel camerounais fait l'objet d'une surveillance sécuritaire particulièrement stricte. Plusieurs organisations de la société civile avaient dénoncé les difficultés d'accès aux audiences du contentieux électoral, pourtant cruciales pour la transparence du processus démocratique. Les événements du 4 août semblent confirmer que cette institution, censée être le garant de la régularité électorale, est devenue une zone interdite aux citoyens ordinaires.