Actualités of Saturday, 1 November 2025

Source: www.camerounweb.com

Cameroun : Paul Biya, 92 ans, de fierté nationale à « humiliation » pour tout un peuple

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Selon une analyse exclusive de Jeune Afrique publiée ce 1er novembre 2025, le record de longévité de Paul Biya à la tête du Cameroun, autrefois source de fierté, est désormais perçu par une large frange de la population comme un motif d'humiliation nationale. François Soudan, directeur de la rédaction du magazine panafricain, décortique au micro de RFI les ressorts de cette mutation psychologique collective qui mine le pouvoir camerounais de l'intérieur.

À 92 ans, Paul Biya détient le record peu enviable de chef d'État le plus âgé au monde encore en fonction. Ce qui était autrefois brandi comme un symbole de sagesse et d'expérience par les partisans du régime est en train de se muer en un véritable boulet politique, selon les révélations de Jeune Afrique.



"Pour beaucoup de Camerounais, avoir à leur tête le chef d'État le plus vieux du monde n'est plus un motif de fierté, mais d'humiliation", analyse François Soudan dans les colonnes de Jeune Afrique. Cette observation, fruit d'une analyse approfondie du contexte post-électoral camerounais, met en lumière un phénomène psychosociologique majeur : le basculement de la perception collective d'un leader historique.


Contrairement à d'autres pays africains où les présidents âgés bénéficient encore d'un respect quasi-sacré lié à la gérontocratie traditionnelle, le Cameroun semble avoir franchi un seuil critique. La jeunesse camerounaise, qui représente plus de 60% de la population, ne se reconnaît plus dans un leadership aussi éloigné de ses réalités générationnelles.


Jeune Afrique révèle également que cette perception d'humiliation s'amplifie par le jeu des comparaisons régionales. Alors que les pays voisins comme le Rwanda, le Ghana ou même la Côte d'Ivoire affichent une certaine vitalité économique et politique, le Cameroun de Biya apparaît figé dans une immobilité contrastant avec les dynamiques continentales.



"Le sentiment d'être gouvernés par le doyen mondial des chefs d'État crée un malaise identitaire", explique François Soudan à RFI. Ce malaise se traduit par une perte de confiance dans les institutions et alimente le discours du "dégagisme" porté notamment par des figures comme Tchiroma Bakary.


Dans son analyse exclusive, Jeune Afrique établit un parallèle historique saisissant. "Biya avait déjà affronté une telle contestation en 1992, mais il a aujourd'hui 33 ans de plus", rappelle François Soudan. Cette arithmétique implacable soulève une question centrale : un homme de 92 ans dispose-t-il encore des ressources physiques et mentales nécessaires pour gérer une crise politique majeure ?


En 1992, Paul Biya avait 59 ans lorsqu'il a dû faire face aux villes mortes et à une contestation populaire d'ampleur comparable. Il avait alors réussi, par un mélange de répression et de concessions, à maintenir son pouvoir. Mais 33 années plus tard, les observateurs s'interrogent : les mêmes recettes fonctionneront-elles ?


Jeune Afrique souligne que l'âge avancé de Paul Biya pose également la question, longtemps taboue en Afrique, de la capacité physique et cognitive des dirigeants vieillissants à exercer le pouvoir. Si cette question est régulièrement débattue en Occident – comme on l'a vu récemment aux États-Unis avec Joe Biden –, elle reste largement censurée dans les espaces politiques africains, par respect pour les aînés.


Pourtant, révèle le magazine panafricain, cette question traverse désormais les conversations privées à Yaoundé, Douala et dans toutes les grandes villes camerounaises. Les apparitions publiques de plus en plus rares du président, ses longs séjours en Suisse, et son absence lors de certains sommets internationaux alimentent les spéculations.


Au-delà de la perception interne, l'âge de Paul Biya devient également un handicap diplomatique pour le Cameroun, selon Jeune Afrique. Sur la scène internationale, le pays peine à projeter une image dynamique et attractive pour les investisseurs. Les partenaires étrangers s'inquiètent de la stabilité à moyen terme d'un pays dont le leader nonagénaire ne prépare visiblement aucune succession.


"Cette incertitude pèse sur la notation du Cameroun par les agences internationales et freine les investissements directs étrangers", note François Soudan dans son analyse.


Jeune Afrique révèle enfin que l'entourage présidentiel se retrouve piégé dans une impasse : comment préparer une succession sans paraître précipiter le départ du président ? Cette paralysie institutionnelle maintient le pays dans un statu quo dangereux, alors que la contestation populaire gagne en intensité.
Le magazine panafricain conclut que le Cameroun se trouve à un tournant historique où la question de l'âge du président, longtemps secondaire, est devenue centrale dans l'équation politique nationale. Un paramètre que ni la répression, ni la propagande ne pourront durablement occulter.