Affaire Ferdinand Ngoh Ngoh : ‘arrête-moi si tu peux’

Le journaliste Kevin Fotso a commis une tribune dans laquelle il explique les coulisses de la guerre des clans qui se poursuit dans le sérail.


[ " ARRÊTE-MOI SI TU PEUX " Par Kevin Fotso ]


Le film à succès de Leonardo DiCaprio et Tom Hanks raconte l'histoire d'un homme recherché que personne ne parvient à arrêter. Une histoire dont Hollywood a le secret et qui ressemble à quelques exceptions près à ce que la presse présente au sujet du cas Ferdinand Ngoh Ngoh. Un mandat d'amener aurait été émis à l'endroit du tout puissant SGPR. Mais qui est assez courageux pour l'exécuter ?


Depuis quelques jours, l'annonce de l'émission d'un mandat d'amener visant celui qu'on appelle à Yaoundé "Vice-Dieu" fait l'objet de tous les débats. L'information a d'abord été révélée par le lanceur d'alerte Boris Bertolt avant d'être reprise par plusieurs médias locaux. Le célèbre magazine Jeune Afrique a également annoncé via son compte Twitter que " selon ses informations, le parquet du Tribunal Criminel Spécial a émis un mandat d'amener contre le secrétaire général de la présidence ".
Ferdinand Ngoh Ngoh fait l'objet d'une enquête dans le cadre du Covidgate. Il s'agit d'un des plus gros scandales financiers de l'histoire du Cameroun indépendant. Au plus fort de la crise sanitaire du Coronavirus, des fonds seront débloqués pour la gestion de la stratégie globale de lutte contre cette pandémie. L'image de ce chef de village refusant un seau de maçon qu'il jugeait insuffisant pour combattre la Covid-19 dans son canton deviendra un symbole. Le financement de la recherche va accoucher des chauves-souris contagieuses et de la préconisation du fipangrass comme solution thérapeutique. À ce jour, même la gestion des sacs de riz parfumé offerts par ORCA reste un mystère.
Le 19 mai 2021, un rapport de la chambre des comptes portant sur 30 % de l'utilisation de cet argent va atterrir sur les réseaux sociaux. Plusieurs fautes de gestion recensées qui vont ajouter à la pression des bailleurs de fonds, la pression populaire. Le FMI sollicite une enquête indépendante, le peuple appelle à la guillotine. Paul Biya, dont on aime à dire que la seule pression qu'il subit c'est la " pression atmosphérique " va céder et autoriser l'ouverture d'une enquête judiciaire. Près de 23 départements ministériels concernés par la gestion d'un pactole de 180 milliards de Francs CFA.

ET NGOH NGOH DANS TOUT ÇA ?

Le 18 octobre dernier, les caméras des chaînes de télévisions camerounaises étaient braquées vers le Tribunal Criminel Spécial. Le Ministre d'État Secrétaire Général à la présidence de la République y était attendu pour son audition face aux enquêteurs du TCS. Pour le tribunal compétent en matière de grande criminalité dans la gestion des deniers publics, il est question de comprendre le rôle du SGPR dans l'attribution de certains marchés. Le proche collaborateur du président de la République a plusieurs fois été cité par les ministres auditionnés comme ordonnateur de " hautes instructions ". Mais Ngoh Ngoh ne se présentera pas au TCS. C'est suite à son refus de répondre à cette convocation que le parquet aurait décidé d'émettre ce mandat d'amener.
Mais une grande énigme demeure. Comment peut-on interpeller manu militari un ministre d'État en fonction, bénéficiant d'une délégation de signature du Président de la République, Secrétaire Général dont l'influence sur la police, la gendarmerie et le BIR est connue ? Un scénario digne d'une saga Hollywoodienne.