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Actualités of Wednesday, 3 October 2018

Source: Mutations N° 4710

'09 fort': les enseignants appellent à la suppression de ce système d’évaluation

Véritable aubaine pour élèves paresseux, les enseignants appellent à la suppression du '09 fort' Véritable aubaine pour élèves paresseux, les enseignants appellent à la suppression du '09 fort'

La chanson résonne dans toutes les têtes et le refrain reprit en boucle par de nombreux jeunes. «Neuf fort ne signifie pas que j’ai échoué, cela veut dire qu’il manquait un peu je passais. Est-ce que ma mère entend ça?

La façon qu’elle a vexe […] Elle veut tout dramatiser. Tout ça à cause de neuf fort. Tout le bavardage là, à cause de neuf fort». Le tube «9 fort» de Sojip, jeune artiste camerounais, lève le voile sur un phénomène déjà bien ancré dans les mœurs des élèves. Pour ces derniers, il y a une différence entre échoué et avoir un 9 fort. «Cette histoire de 9 fort voit le jour dans les années 90. Un neuf est considéré de «fort», selon les élèves, lorsque sa partie décimale dépasse cinquante.

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Il émane des appréciations des enseignants: nul, très faible, faible, insuffisant, médiocre et moyen. Et celui qui a le 9 fort est donc médiocre», explique un enseignant d’Education à la citoyenneté et à la morale (Ecm).
Dans les lycées d’Enseignement secondaire général, le phénomène tend à s’institutionnaliser. Chaque année, une cinquantaine d’élèves sont admis en classe supérieure avec des moyennes inférieures à 10. «Dans les classes vous pouvez avoir plus d’une dizaine de neuf, pour confort moral parce que l’enfant intervient plus en classe, ou qu’il répond aux questions, l’enseignant décide de mettre la moyenne (10 ndlr) pour l’encourager», ajoute Maurice Fils Ondoa, enseignant.

Une pratique qui, selon les enseignants, n’autorise pas un élève ayant obtenu «9 fort» à se prévaloir admissible. Ces derniers devant être soumis à des cours de rattrapage ou de remise à niveau. «Un élève avec un 9 fort cela veut juste dire que cet élève est recyclable. Parce que dans la plus part des cas, cette note ne reflète pas son niveau, étant donné qu’il arrive que l’enseignant donne des bonus de point», confie José Meli, inspecteur pédagogique national de français.

Pour ces mêmes enseignants, ce phénomène est une autre fausse note de l’enseignement secondaire au Cameroun. Il devait d’ailleurs rapidement être aboli. «Dans les écoles privées on peut comprendre qu’on prenne des élèves en dessous de la moyenne parce qu’il faut flatter le parent, au lycée c’est inadmissible.

Voilà les origines de la baisse drastique du niveau des élèves. Les élèves ne réussissent plus, on les fait réussir», scande un professeur d’anglais au Lycée bilingue d’Essos. «Un enfant qui va à chaque fois en classe supérieur avec une moyenne de 9 fort ou pas, évolue sans niveau, il continuera dans la médiocrité dans tout son parcours jusqu’à être bloqué», ajoute un autre enseignant.

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Pourtant, la mention est devenue une véritable aubaine pour élèves «paresseux». Il y a une différence entre être recalé et avoir un «9 fort». «J’ai eu 9 fort, je n’étais pas au mieux de ma forme, je pouvais passer», «j’étais à côté de la moyenne, je peux faire mieux, je n’ai pas échoué», scandent de nombreux élèves.

Le phénomène est d’autant plus encouragé par les multiples partenariats entre établissements scolaires et instances telles que l’Organisation des Nations unis pour l’éducation, la science et la culture (Unesco). «Car pour prétendre à une éventuelle subvention, il faut un nombre conséquent d’admis», clame Ulrich Bettou, Censeur