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Opinions of Monday, 16 May 2022

Auteur: William Bayiba

Origine des Bassa'a: William Bayiba répond à prof Edouard Bokagne

Des Mbombock Bassa'a Des Mbombock Bassa'a

Le professeur a écrit une tribune dans laquelle il donne son point de vue sur les origines du peuple Bassa'a. Dans sa sortie, l'universitaire émet des doutes sur les origines égyptiennes du peuple Bassa'a. Les points de vue d'Edouard Bokagné ne sont pas partagés par William Bayiba. Dans une tribune, il déclare que l'argumentaire de l'universitaire "se perd en scepticisme dont l'origine est peut-être psychologique".

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"Prof Édouard Bokagné, votre doute honore la science historique. Mais se perd en scepticisme dont l'origine est peut-être psychologique. Passons. Je voudrais m'arrêter sur un aspect subsidiaire que vous avez évoqué, dans votre texte qui remet en cause l'origine égyptienne des Bassa'a pour le disqualifier : la fascination des Bassa'a pour l'eau.

Je vous invite à prendre une carte du Cameroun et à identifier le peuplement des Bassa'a actuellement. Vous allez vous rendre compte qu'ils sont systématiquement installés sur les cours aval des principaux fleuves qui se jettent à la mer et que cette installation est régulée.

Qu'est-ce que je veux dire par là ?

L'installation des Bassa'a sur les derniers dizaines de kilomètres des fleuves qui s'ouvrent sur la mer est accompagnée de la présence de peuples bien plus minoritaires dans l'immédiateté dudit Océan. Vous avez fait un amalgame entre les théories égyptologiques et l'impuissance militaire. Je vous propose un angle économique dans un contexte de puissance militaire maîtrisée et de quête d'harmonie dans un contexte de quête invétérée de vivre en harmonie entre les Bassa'a d'abord.

Lors de la période précoloniale, l'une des principales richesses à commercer était le sel. C'est un fait quasi universel en Afrique. Et l'un des réservoirs de sel dans la zone est effectivement l'océan. L'installation des Bassa'a dans le cours inférieur du Nyong, de la Sanaga, du Nkam et du Wouri n'est donc pas un hasard. Et leur réputation et la perception belliqueuse de leur personnalité viendrait précisément de leur qualité de collecteurs invétérés de tributs à toute espèce de commerçants.

Quid des peuples apparentés et minoritaires que l'on retrouve dans l'immédiateté de la mer ?
Les Bassa'a sont restés pendant longtemps les maîtres incontestés de la région, y compris par la maîtrise du fer et du terrain. Et du fait des conflits internes entre les clans Bassa'a dont un seul (comme les Ndog Ngond) est déjà plus imposant que l'ensemble des Douala par exemple, il fallait des « Nations-tampons».

C'est ainsi qu'il faut comprendre la présence des Bakoko, des Yakalak, des Yabi, bref des Mpoo dans le court inférieur final de l'océan cette source de richesse. C'est aussi le rôle que les Douala ont commencé à jouer à Douala et qui a été réorienté par l'arrivée de Européens et la traite atlantique et surtout la colonisation.

Leur présence n'était que régulatrice de la gestion de cette richesse. Et il n'en est pas seulement ainsi de la gestion de la richesse du sel. Mais aussi de la gestion de la cité.

Considérez la ville d'Édéa qui est sans doute la plus vieille ville de la région. Elle est occupée par les Bakoko qui sont pourtant entourés de Bassa'a. Est-ce à dire que les Bakoko étaient intrinsèquement plus forts ? Non ! L'enjeu de la gestion d'Édéa imposait qu'aucun clan Bassa'a n'en ait la gestion exclusive et qu'elle soit accessible à tout le monde ; les occupants consensuels étant incapables d'en priver l'accès à quiconque.

Ce n'est dès lors pas un hasard si la lingua Franca à Édéa est le Bassa'a et non pas le Basso'o. Un autre exemple c'est précisément la gestion de Ngock Lipondo encore appelé Ngock Litouba. Aucun Bassa'a n'en a la gestion exclusive. Mais toujours un groupe minoritaire. Voilà pour l'explication économique.

Sur Ngock Lipondo, vous m'étonnez un peu en vous étonnant. L'allégorie de Ngock Litouba a été expliquée depuis longtemps. Il s'agit d'une image. Quand les Bassa'a disent qu'ils viennent de Ngock Litouba cela veut précisément dire qu'ils viennent du vagin d'une femme. En principe, tous les hommes viennent du même trou, de la même roche. Essayez de faire le rapprochement entre Ngo et Ngock. Ngo veut dire «la fille de…». Mais aussi le socle sur lequel repose un tel... Donc Ngo Bayiha est non seulement fille de Bayiha, mais aussi l'ultime support, la roche sur laquelle se construit les Bayiha. Je suis déçu de la légèreté de votre post sur ces deux aspects.

Le dernier aspect est relatif à la dispersion des Bassa'a. Au moment où nous parlons, je vous signale qu'il existe un groupe Facebook qui regroupe des Bassa'a de plusieurs pays d'Afrique et qui se rencontrent physiquement aux USA. Ils viennent du Liberia (Bassa'a Kru), du Nigeria (Nassarawa) et du Cameroun (Bassa'a). Penser que les Bassa'a se retrouvent seulement au Cameroun i.e. dans la forêt et n'aient eue qu'une fascination pour la forêt et le Sud est une légèreté professeur".