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Opinions of Thursday, 11 October 2018

Auteur: Michel Biem Tong

Sérail: voici le ministre qui conduit le Cameroun au gouffre

Les ministres lors d'un conseil annuel à Etoudi Les ministres lors d'un conseil annuel à Etoudi

Il faut vivre au Cameroun pour y voir des vertes et des pas mûres. On a très souvent questionné les choix gouvernementaux du chef de l’Etat. En nommant Paul Atanga Nji à la tête du ministère de l’Administration territoriale le 2 mars dernier, Paul Biya, comme on le dit vulgairement en langage camerounais, « a fait fort ». D’ailleurs fallait-il s’attendre à mieux d’un homme au niveau d’études sommaire dont de multiples larcins l’ont conduit à la case prison ?

C’est donc dans les milieux de la pègre que Paul Biya est allé chercher son homonyme Paul Atanga Nji, homme d’affaires anglophone originaire de Santa-Akum dans la partie nord du Southern Cameroon, pour en faire d’abord un chargé de mission (des missions compliquées d’après certaines sources) à la présidence de la République, puis un secrétaire permanent du Conseil national de la sécurité (en charge de centraliser le renseignement) avant de lui confier le portefeuille du ministère de l’Intérieur.

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Il ne s’en faudra pas de beaucoup de temps pour qu’il abatte ses premières cartes. Le 25 mai dernier, les habitants de Menka Pinying, dans le Cameroun anglophone secoué par des revendications indépendantistes, se réveillent dans l’horreur et la stupeur. Les corps d’une trentaine de jeunes gisent dans une cour du village et à l’intérieur d’une case de passage. Ils ont été exécutés par des tueurs professionnels du régime de Paul Biya.

Il s’agit d’un groupe de jeunes qui des semaines auparavant rackettait les populations, volait, violait en se passant pour les combattants indépendantistes anglophones « Amba Boys ». Atanga Nji était au courant car des bulletins de renseignements quotidiens sur leurs agissements lui parvenaient. Mais il a laissé faire. Les militants anglophones l’accusent d’avoir recruté, financé puis fait exécuter ces jeunes parce qu’ils n’ont pas rempli la mission qu’il leur a assigné : kidnapper et exiger des rançons au nom des « Amba Boys » en vue de jeter le discrédit sur ces derniers et monter les populations contre eux.

C’est toujours sous le ministre Paul Atanga Nji que le 9 septembre dernier, des personnes non-identifiées, à l’aide d’un caterpillar, sont allées creuser un trou à l’entrée de Bamenda et ont détruit les bus d’Amour Mezam. Tout ceci a eu lieu des heures durant sans la moindre intervention policière ni militaire. Cet incident tout comme bien d’autres auparavant, notamment l’attaque et le kidnapping des élèves et des responsables d’établissement à Bafut, interviennent dans un contexte où de sources locales font état de l’apparition d’une milice qui commet des exactions au nom des indépendantistes anglophones. Dans une lettre anonyme adressée le 13 août dernier à un activiste ambazonien, un ministre anglophone annonçait que « pendant ce temps, à Bamenda, une autre élite est en train d’armer des jeunes ». Allez savoir de quelle élite il s’agit.

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Le 17 septembre dernier, soit quelques semaines avant l’élection présidentielle, les Camerounais se sont réveillés avec une bien curieuse nouvelle. Plusieurs journaux camerounais rapportent à leurs Unes qu’un institut de sondage américain crédite Paul Biya de 80% de voix. Vérification faite, le cabinet en question appartient à un frère cadet de Paul Atanga Nji qui réside aux Etats-Unis, lequel cabinet n’a aucune expérience en matière de sondage. La frappe du siècle Made in Atanga Nji.

Peu avare en coups fourrés, celui dont le nom a été cité en novembre 2011 dans un scandale de détournement en centaine de millions à la Cameroon postal services dans un rapport de la Commission nationale anti-corruption va remettre ça. Après la présidentielle du 7 octobre dernier, soit le 8 octobre, un groupe d’Occidentaux est présenté à la presse nationale comme étant des observateurs électoraux de Transparency International. Ce dernier se fend en satisfecit sur le déroulement des élections. Mais le lendemain, dans un communiqué, l’ONG en charge de lutter contre la corruption dément avoir mandaté quiconque au Cameroun pour observer le déroulement du scrutin. Qui a donc fait venir cette bande d’escrocs et d’imposteurs au Cameroun pour effectuer un travail aussi sensible ? Atanga Paul Nji. N’est-ce pas lui qui accrédite les observateurs électoraux ?

Si à tous ces coups tordus on ajoute son discours va-t’en guerre au début de la crise anglophone en octobre 2016, c’en est trop pour un seul homme. Dans un pays sérieux, rien que le scandale des faux observateurs de Transparency International lui aurait valu d’être remercié du gouvernement. Malheureusement, en République bananière du Cameroun, la vertu et la rectitude morale sont de bien vilains défauts. Vivons seulement !