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Diasporia News of Thursday, 18 November 2021

Source: La Voix du Centre

Restitution des œuvres d'art: le Cameroun loin de ses œuvres pillées

Alors que la France vient de restituer 26 œuvres d’art au Benin de Patrice Talon, les autres pays du continent accélèrent les démarches. Yaoundé, par contre, continue de trainer les pieds.

Chose promise, chose due. Emmanuel Macron a accéléré la restitution solennelle, la semaine dernière, de 26 œuvres au Bénin. Ces œuvres étaient exposées au musée parisien du Quai Branly. Elles avaient été pillées pendant la période coloniale dans les trésors royaux d’Abomey. Pour Patrice Talon, le président béninois, c’est une victoire diplomatique indéniable. Surtout que d’autres restitutions sont en vue.

Sur le continent, le dynamisme de Talon contraste avec le silence de certains de ses pairs, en Afrique centrale surtout. Et pourtant, les musées ancestraux dans cette zone ont été fortement pillés par les. troupes coloniales françaises, le Cameroun surtout. Il est admis que le pays de Paul Biya est concerné au premier chef par ces restitutions.

Des évaluations empiriques estiment que le nombre d’objets d’art volés dans les chefferies pendant les années de colonisation et emportés en France est de loin le plus important en- Afrique. En Allemagne, les mêmes estimations indiquent que le patrimoine du Cameroun’ est encore plus important qu’on l’imagine. Un motif suffisant pour se presser, mais Yaoundé reste attentiste.

Tout n’a pas toujours été aussi calme. Dès les mois qui ont suivi le rapport Sarr-Savoy, commandé par Emmanuel Macron en 2017 pour la restitution des œuvres d’art du continent exposées dans les galeries des musées publics français, les autorités camerounaises ont mis le pied sur l’accélérateur en créant une commission interministérielle pour plancher sur cette question.

En plus du ministère des Arts et de la culture qui participaient aux réunions de cette commission à l’immeuble Étoile, il y avait les ministères de l’Administration territoriale, de l’Économie, des Mines et de l’industrie et même celui des Relations extérieures. Des responsables de la présidence de la République ont aussi été associés aux travaux.

A la fin de ses travaux, la commission a produit un rapport technique que Narcisse Mouelle Kombi, alors ministre des Arts et de la culture, a soutenu le 3 janvier 2019, la veille de sa mutation au ministère des Sports et de l’éducation physique. Depuis ce remaniement ministériel en tout cas, c’est le silence radio. Le rapport a pourtant été transmis à la présidence de la République à l’appréciation du président Paul Biya, le seul capable de* déclencher ce dossier auprès des autorités françaises. Une volonté politique qui manque à l’appel sans que personne puisse expliquer pourquoi. En clair, le Cameroun prend son temps.

Le dossier technique de la commission interministérielle attend toujours dans les tiroirs du président. Il n’est pas possible de le consulter pour l’instant, en tout cas pas tant que le président ne s’est pas décidé à appuyer la manivelle. Toutefois, des indiscrétions recueillies à bonnes sources confient que les experts camerounais saluent le rapport Sarr-Savoy.

Mais ils demandent à la France d’aller plus loin en restituant aussi au Cameroun les archives gardées dans les collections privées en France.
La commission interministérielle a aussi recommandé des missions en France pour faire un inventaire complet de son patrimoine/Pour l’instant, il n’est pas possible de connaître avec précision ce patrimoine. Certains pays du continent ont commencé cet important inventaire.

Le Benin en premier. Le pays a été sur le point d’obtenir un prêt de plusieurs objets d’art, mais le projet a avorté à cause de la crise des gilets jaunes. Le projet a complètement été renvoyé aux calendes grecques à cause de la crise de coronavirus. Mais Patrice Talon va le ressusciter. Et quand il rend visite à Macron au début de ce mois, c’est pour sceller définitivement la restitution de 26 œuvres d’art.

Mais il n’y a pas que le Benin. Le Sénégal est aussi très actif sur le dossier. Le pays a même fait Construire un musée moderne et futuriste, le Musée des civilisations noires” de Dakar, qui est censé accueillir les ouvres restituées. La Côte d’ivoire n’est de reste. Le pays des Eléphants est sur le point d’accueillir Le Tambour parleur ébrié. Une œuvre majeure considérée comme une pièce maîtresse de l’identité ivoirienne confisquée par les colons français en 1916.

Au Cameroun, les experts guettent la statué de la reine Bangwa, estimée à 3,4 millions de dollars, environ 2 milliards de francs CFA. Cette pièce a été acquise par la fondation Dapper à Paris. Il y a aussi la statue Mabea identifiée dans une collection en France. Elle est estimée à près de 4 milliards de francs CFA. Pas sûr que ces œuvres retournent au Cameroun dans les prochains jours.