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Opinions of Jeudi, 30 Novembre 2017

Auteur: camer.be

Les dures réalités de la démocratie que Paul Biya ne respecte pas

la démocratie repose sur l'égalité, la liberté, et le consentement qui font partie du contrat social la démocratie repose sur l'égalité, la liberté, et le consentement qui font partie du contrat social

Alors que Paul Biya se prépare à un autre couronnement fantastique l'année prochaine pour étendre ses 35 ans au pouvoir dans le pays, le CL2P profite de l'occasion pour rappeler aux Camerounais ordinaires le sens d'une élection démocratique et élargir leur compréhension de la démocratie, de la lutte pour le fonctionnement démocratique des institutions, et de la promotion de l’Égalité citoyenne.

1) Élection démocratique et Consentement

Pour qu'une élection s'appelle démocratique cela exige le consentement de tout le corps électoral. Cette donnée est fondée sur la compréhension que nous obtenons nos droits non pas de l'État ou du président, mais de notre condition de natalité. À ce titre, je suis citoyen camerounais parce que né au Cameroun de parents Camerounais. En pratique, l'État du Cameroun ne peut pas décider si je suis oui ou non camerounais, pour la même raison qui voudrait que l'État ne peut révoquer ma citoyenneté. En conséquence, la démocratie repose sur l'égalité, la liberté, et le consentement qui font partie intégrante du contrat social. Sur cette base, personne ne devrait être exclu du régime démocratique.

La vraie question devient aussitôt celle du consentement, et de quel genre de consentement s'agit-il? Cette forme de démocratie est fondée sur la connaissance que les citoyens ordinaires sont dotés de la capacité d'intérêt personnel éclairé et d'un fort sens des principes, et donc qu'ils sont investis du pouvoir de devenir des acteurs sociaux rationnels et des maîtres de leurs propres choix, conscients de leur responsabilité démocratique.

Ainsi, puisque la démocratie repose sur le consentement et non sur la force et la domination, aucun droit ne doit être révoqué unilatéralement et arbitrairement comme le vivent dans leur chair les prisonniers politiques reconnus par le CL2P. En l'affirmant et le réaffirmant au quotidien, le CL2P se fait inévitablement de nombreux ennemis dans le contexte politique totalitaire du Cameroun marqué notamment par la banalisation du crime politique; des ennemis qui vont continuer à se plaindre et à s'en prendre à nous à travers des jurons les plus méprisants, sans pour autant jamais prouver pourquoi la citoyenneté de ces prisonniers politiques mériteraient d'être autant bafouée voire niée.

Par conséquent, avant que nos ennemis commencent à cracher sur nos visages, le minimum d'honnêteté intellectuelle serait de reconnaître que ce n'est pas le CL2P qui a politisé le système juridique et judiciaire; c'est le gouvernement du Cameroun. Sinon comment pourrait-on expliquer que les soi-disant « prévaricateurs de la fortune publique » - une forme bien originale de crime de droit commun - soient soumis sans répit à une véritable inquisition publique extraordinaire, dirigée par un cabinet noir ou « Deep State » placé directement sous les ordres du président Paul Biya. De plus, ces prisonniers sont jugés par des tribunaux spéciaux et embastillés dans des prisons à sécurité maximale sous une chaîne de commandement militaire? En fait, ce que nous avons ici ce sont des gens qui sont avant tout des prisonniers des institutions camerounaises, dont de la première d'entre-elles (la présidence de la république pour ne pas la nommer); des institutions autocratiques donc qui n'ont aucune gêne à accomplir leurs desseins macabres en violation flagrante des conventions internationales sur les droits de l'Homme que le régime de Yaoundé s'est curieusement toujours empressé de signer sans jamais exécuter ni respecter.

2) Élection démocratique et la création de la minorité permanente

La démocratie ne signifie pas le droit de la majorité. Cela explique la logique de la séparation des pouvoirs et comment, dans un pays normal, le parlement et les tribunaux constituent des freins et des contrepoids qui servent de piège à souris contre toute surpuissance du pouvoir.

Aux États-Unis d'Amérique par exemple, il y a un collège électoral où le pouvoir des grands États comme la Californie, le Texas, et New York équivaut et est contrebalancé par le pouvoir des petits États: C'est ce qui explique en partie pourquoi Donald Trump est président, même s'il a perdu le vote populaire par 3 millions de voix. Cela a surtout à voir avec les pères fondateurs américains qui ont de la sorte tenté de protéger les petits États de la domination des grands.

Au Cameroun, par contre, nous avons un régime présidentiel doté d'un pouvoir exécutif renforcé qui transforme de facto le président en monarque absolu. Le président incarne ainsi un pouvoir souverain et peut donc opposer son veto à l'Assemblée nationale et aux tribunaux. Ce type de pouvoir absolu crée inévitablement un régime d'unanimité et un problème subséquent de représentation. Aussi les prisonniers politiques reconnus par le CL2P deviennent sans le vouloir un véritable poids lourd autour des chevilles du président. Car en pratique, ces prisonniers politiques constituent une minorité permanente illégale et illégitime et difficilement envisageable dans tout régime qui se veut démocratique. Ils deviendraient donc presque une minorité à protéger par le droit des minorités (on voit notamment à ce sujet les difficultés rencontrées par le gouvernement espagnol pour exclure les leaders indépendantistes catalans du jeu politique).

À l'évidence les gens qui ne croient pas à la démocratie et au droit des minorités ne peuvent pas s'appeler ou se revendiquer démocrates, parce qu’ils sont effectivement en dehors de tout processus ou champ démocratique. Ils sont impliqués dans des modes de pouvoir et de dévolution du pouvoir anti-démocratiques et archaïques.

3) Élection démocratique et Prise de décision dans une démocratie

La question principale, par conséquent, est de savoir comment arriver à une décision collective dans une démocratie?

Des personnalités comme Amartya Sen et Nelson Mandela, puis le CL2P ont longuement théorisé sur la notion d ‘ « Arbre à Palabre Africain » et sur l'importance de la délibération dans un système démocratique. Il est vrai que dans ce type de système la délibération peut prendre beaucoup de temps. Cependant cela exige des leaders ayant de réelles compétences politiques et un certain talent pour construire des coalitions grâce à la confiance qu'ils inspirent et non par leur autorité. Le consensus dans ce système n'est pas obtenu par l'imposition de la majorité, mais par l'absence d'opposition. Cette pratique garantit en effet que personne n'impose sa volonté aux autres. L'objectif est toujours ici de faire converger les options politiques plutôt que de prétendre à des victoires perpétuelles.

Appliqué à la gouvernance, la politique devient un site d'élaboration, de négociation, et de production en permanence de sens commun.

Au Cameroun, le CL2P affirme à maintes reprises qu'il s'oppose à toute élection présidentielle en l'absence de personnes qu'il considère comme des prisonniers politiques, et qui sont opportunément maintenus en prison parce que considérées ou vus comme des concurrents potentiels sérieux, crédibles, et redoutés. Cela contribuera inévitablement à valider le pouvoir nu et par le vide du régime de Biya, puis son contrôle machiavélique sur les corps des Camerounais; en somme une stratégie autoritaire, anti-démocratique, et antipolitique.

Les Camerounais vont-ils donc continuer à demeurer inactifs, et laisser cette absurdité se poursuivre indéfiniment? Où sont notamment ces jeunes dont la vie a été ruinée toutes ces années? Des milliers d'entre eux ont péri ou sont encore en train de périr en route vers l'Europe, principalement à cause du chômage massif, de l'incompétence notoire du régime en place, puis l'absence de tout avenir envisageable dans un tel pays.

Paradoxalement ce seraient aussi ces personnes qui voudraient toujours et encore que les mêmes politiciens continuent comme d'habitude? Une réelle absurdité camerounaise.