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Politique of Friday, 19 November 2021

Source: La Nouvelle Expression

Crise sociopolitique au Cameroun: SM Sokoudjou rejoint par ses pairs de l’Ouest dans la lutte

Jusque-là muets sur la marche et la gestion du pays, les autres monarques viennent d’effectuer une sortie dans laquelle, ils surprennent par leur ton d’une froideur proche, voire plus à celle du “fo’o’’ des Bamendjou.

Le combat que mène SM Jean Rameau Sokoudjou depuis des décennies en vue d’attirer l’attention de l’opinion sur les dérives managériales du régime au pouvoir, est désormais partagé par les autres chefs traditionnels de la Région de l’Ouest. Au moment où on les croyait focalisés dans les batailles pour une place au sein du Conseil régional, ceux-ci viennent de surprendre par une déclaration musclée dans laquelle ils évoquent point par point, les sujets majeurs de l’heure au Cameroun.

Sur le plan sécuritaire, ces gardiens des valeurs ancestrales se penchent sur l’insécurité dans le septentrion et la Région de l’Est, mais s’attardent longuement sur la crise qui sévit dans les deux Régions anglophones. «La guerre dans le Noso est en train de verser dans une barbarie insoutenable avec pour principales victimes, les civils et même les enfants qui voulaient juste s’instruire. Des assassinats, décapitations, exécutions sommaires, enlèvements et humiliations de toutes sortes se multiplient et se banalisent, portant ainsi une atteinte grave aux droits et à la dignité humaine dans notre pays», rappellent-ils.

Pour eux, le fait que la chefferie traditionnelle, rempart du peuple en cas de doute, lieu de décharge de tous leurs problèmes, antre séculaire de réconciliation et de « dénouement des fils entremêlés», soit aussi touchée dans son essence avec des atteintes à sa sacralité et même à l’intégrité physique des gardiens de la tradition, démontre à suffire la profondeur de la fracture sociale entre une partie du peuple et ses dirigeants à tous les niveaux. Loin de se limiter à rappeler ces faits, les chefs traditionnels de la Région de l’Ouest condamnent dans leur déclaration, les « de violences disproportionnées et gratuites ».

De même, ils invitent les parlementaires à prendre leurs responsabilités en inscrivant à leur ordre du jour cet épineux problème, pour enfin apporter leurs propres contributions aux solutions de retour à la paix; vu que le Grand Dialogue national a échoué. Ils se disent également favorables à un nouveau dialogue qui devrait réunir autour d’un ou des médiateurs neutres, les protagonistes reconnus et mandatés.

Sur le plan politique, ces chefs traditionnels de l’Ouest font le constat d’une montée progressive d’une certaine tension et frilosité qui crée un climat de méfiance et d’intolérance et même de défiance. «Tous les coups sont désormais permis et les armes les plus viles comme la tribalisation de la scène politique et l’instrumentalisation politique de la justice sont utilisées; les libertés fondamentales sont de plus en plus bafouées, malgré une certaine liberté d’expression sur les antennes télé ou radio et sur les réseaux sociaux.

Certains partis politiques adoptent une posture radicale, poussant les pouvoirs publics à leur tour à une rigidité ; le dialogue et la concertation sont pratiquement rompus entre les pouvoirs publics et des partis d’opposition ; les lois et textes de la République sont bafoués autant par le pouvoir que par l’opposition au gré des intérêts égoïstes ; les pouvoirs publics semblent ne plus être réceptifs qu’aux courtisans et laudateurs et tolèrent de moins en moins la critique, fut-elle positive: de même, du haut de leur piédestal, ils ne donnent désormais que très peu de considération au citoyen et à l’humain; l’équilibre régional qui avait un objectif noble d’assurer une représentativité de toutes les aires socioculturelles à la gestion de la chose publique semble dépassé de nos jours, mais, surtout est travesti par le favoritisme, la corruption et le népotisme; les relations entre les chefs traditionnels et les autorités administratives se raidissent peu à peu, donnant lieu à des scènes surréalistes; les rapports entre la diaspora et les pouvoirs sont plus que délétères et, ce problème est adressé sous un prisme tribal», déroulent-ils.

Pour résoudre ces maux, ces monarques de la Région de l’Ouest suggèrent non seulement une reconnaissance de la légitimité gouvernementale par l’opposition dite radicale ; ce qui selon eux, permettra de décrisper la scène politique et créer ainsi une ouverture de concertation ; mais également, la mise en place urgente d’un cadre de concertation entre les pouvoirs publics et les partis politiques.

La mise en veille des dissensions partisanes pour une union sacrée de tous afin de trouver une solution au conflit interne dans le Nord-ouest et le Sud-ouest; une concertation de tous les leaders d’opinion afin de définir de façon consensuelle un cadre pour une prochaine transition paisible ; une réforme concertée des lois électorales avec en prime la définition d’un calendrier électoral permanent; une réforme constitutionnelle afin d’assurer une stabilité et une alternance redynamisante à la tête de nos institutions; la mise en œuvre réelle d’une certaine indépendance entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, afin d’améliorer de façon significative, la démocratie- camerounaise en construction; la réforme de l’équilibre régional par une répartition équitable de 10% par Région, basée sur le mérite, font également partie de leurs propositions.

Dans la déclaration rendue publique-mardi 24 novembre dernier, ces chefs traditionnels saluent la manière par laquelle la pandémie de covid-19 a été et continue d’être gérée au Cameroun. Toutefois, ils rappellent au gouvernement la nécessité de renforcer les plateaux techniques dans les hôpitaux et expriment leur désir de voir enfin se matérialiser le projet de «couverture santé universelle».

La déclaration qui affole la toile est en effet signée de sept chefs traditionnels en qualité de présidents du conseil des chefs traditionnels de leurs départements respectifs. Il s’agit de Louis Ngapmou (Ndé); de David Fondjo (Haut-Nkam) ; de Jean Takoukam (Hauts-Plateaux) ; de Mitterrand Moumbe (Mifi); de Jean Teigni Detio (Bamboutos); de Georges Désiré Pouokam (Koung-Khi) et de Gaston Guemegni (Menoua).

Ils rejoignent ainsi SM Jean Rameau Sokoudjou qui a toujours pensé qu’en tant que “bergers”, les chefs traditionnels ont l’obligation d’éclairer leurs peuples sur tous les sujets. Y compris les plus sensibles.