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Opinions of Thursday, 1 September 2016

Auteur: Jules Romuald Nkonlak

Administration publique : qui a peur des réformes ?

Photo d'archives utilisée à titre d'illustration Photo d'archives utilisée à titre d'illustration

Les tentatives initiées par certains membres du gouvernement font souvent face à des blocages.

S’agit-il de simples soupçons, de paranoïa ou de pratiques réelles ? Au Cameroun, depuis plusieurs années, les nominations à des postes importants, les résultats de certains concours seraient fortement influencés par des réseaux mafieux tapis dans les services du Premier ministre ou à la présidence de la République. Le retard connu dans la nomination des proviseurs de lycées, très attendue en cette veille de rentrée scolaire, a remis le sujet sur la table.

Les sources du journal Le jour, comme nous l’indiquions dans l’édition d’hier, affirment que « les nominations sont bloquées depuis une dizaine de jours dans les services du Premier ministre ». Surprenant ? Pas vraiment, lorsque l’on pense à certaines autres tentatives de « révolution » qui ont rencontré des obstacles à un certain niveau de la chaîne. Au point où dans l’opinion, il n’est pas rare d’entendre dire que le meilleur moyen de se créer des ennuis lorsqu’on est nommé à un poste de responsabilité au Cameroun c’est de tenter de faire bouger les choses.

S’agissant de quelques cas récents, en 2014, certains médias ont indiqué que les nominations dans la préfectorale tardaient parce que les propositions faites par le ministre avaient été bloquées. Un peu plus tard, en avril 2015, des nominations faites par le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Essimi Menye, ont été rapportées par le Premier ministre Philemon Yang. Cellesci concernaient trois inspecteurs généraux et deux directeurs par intérim.

La même année, une longue attente a précédé les résultats du concours d’entrée à la police. L’examen organisé en février n’avait toujours pas connu de verdict en septembre. Le délégué général de la Sûreté nationale, Martin Mbarga Nguélé, interrogé à ce sujet, avait déclaré qu’ils seraient publiés d’un moment à l’autre et qu’il fallait faire des vérifications, s’assurer de l’équilibre régional, entre autres.

Réseaux

Mais d’après certaines sources, les causes du retard étaient ailleurs. Selon cellesci, la volonté de révolution du Dgsn, qui souhaitait des résultats les plus honnêtes possibles, s’étaient heurtés à des réseaux qui voulaient intégrer des « proches ». la publication de ces résultats par la suite, comme ceux de certains autres concours d’entrée dans les grandes écoles, a été suivie de nombreuses protestations. Les « réseaux » avaient-ils eu le dessus ?

Concernant les nominations, la présidence de la République et les Services du Premier ministre, selon les cas, sont considérés comme des espèces de goulots d’étranglement, des officines où sont transformées les propositions faites par les ministres. Par qui ? « De manière générale les projets de textes sont préparés par les administrations et les structures concernées. Ils sont transmis au Premier Ministre, Chef du Gouvernement, qui apprécie et, le cas échéant, les transmet au Président de la République.

Dans le cas des structures relevant directement de la Présidence, par exemple le Ministère de la Défense, le Ministère chargé du Contrôle supérieur de l’État, le Ministère chargé des Relations avec les Assemblées, les responsables de ces entités les transmettent soient directement au Chef de l’État, soit indirectement à travers le Secrétaire Général de la Présidence. S’agissant des nominations au Ministère de la Défense, le Secrétaire général de la Présidence les découvre soit au moment où ses services doivent apposer les cachets d’officialisation, soit quand ils sont présentés dans les medias publics », écrit Jean –Marie Atangana Mebara, ancien secrétaire général de la présidence de la République dans le livre « Le Secrétaire général de la présidence de la République au Cameroun ».

Face à la difficulté d’avoir des faits très précis concernant ces sujets qui sont en général très secrets, il a fallu se retourner vers l’expérience d’anciens pontes du régime aujourd’hui en disgrâce. Ceux-ci, à travers divers témoignages, montrent bien combien il est difficile de conduire à bon port des réformes dans l’administration camerounaises. Dans son livre « Le choix de l’action », Marafa Hamidou Yaya cite un nombre importants de chantiers qu’il a entrepris pendant son passage à la tête du ministère de l’Administration territoriale et qui n’ont pas toujours abouti. Urbain Olanguena Awono, ancien ministre de la Santé publique, fait également comprendre dans «Mensonges d’Etat » que la compétence, la volonté de faire avancer les choses ne sont pas toujours bien vues dans l’administration camerounaise.